L’inquiétude règne à Kinshasa après les vols commis à l’Institut des musées nationaux du Zaïre dans les jours qui ont suivi l’arrivée des troupes de Kabila dans la capitale de l’ex-Zaïre, le 17 mai. Plutôt que piller systématiquement, comme ils l’ont fait pour les locaux administratifs, les voleurs, apparemment bien informés, ont emporté plusieurs pièces majeures des collections.
PARIS. Le 6 juin, le contact téléphonique entre le Conseil international des musées à Paris (Icom) et la directrice adjointe de l’Institut des musées nationaux du Zaïre n’avait toujours pas été rétabli. Dix jours plus tôt, cette dernière rendait compte au secrétaire général de l’Icom, Élisabeth des Portes, de vols perpétrés à l’Institut. Alertée par la rumeur – "la collection de Mobutu a été pillée !" – la directrice-adjointe s’était en effet rendue sur place pour constater l’étendue des dégâts. Situé dans le périmètre du palais présidentiel de Mobutu, à l’écart du centre ville où se trouve sa salle d’exposition, l’Institut regroupe des locaux administratifs et des réserves où sont conservés près de 50 000 objets ethnographiques et archéologiques auxquels s’ajoutent des œuvres d’art moderne et contemporain. Si les bureaux ont été dévalisés de leur matériel informatique, technique et scientifique, comme de leur mobilier, les réserves n’ont pas fait l’objet d’un pillage systématique, en dépit du grand désordre qui y régnait. Des pièces textiles jonchaient le sol aux alentours des bâtiments et un rapide examen a montré que plusieurs œuvres majeures avaient disparu. Parmi elles, une rare statue d’ancêtre Hemba en bois, qui a été présentée à plusieurs reprises au sein de différentes expositions internationales, notamment en Suisse et aux États-Unis ; une des douze statues royales Ndop connues dans le monde, restituée en 1977 au Zaïre par le Musée de Tervuren (Belgique) en compagnie de 142 autres pièces ; un panier de sagesse Kweemishyaam’l orné de perles, de cauris et de peau de léopard... Des sculptures contemporaines de deux artistes zaïrois renommés, Liyolo et Kitenda, ont également été dérobées. "Le personnel de l’Institut effectue actuellement le récolement des collections, très précisément inventoriées et documentées. Nous devrions rapidement connaître l’ampleur des vols, espère Élisabeth des Portes, mais en l’état des informations dont nous disposons, les voleurs semblent avoir agi de façon sélective : plutôt que d’emporter des pièces ordinaires, pourtant plus faciles à écouler, ils ont choisi des œuvres qui sont en principe invendables." "Ce vol de pièces n’a pas de sens. Il s’agit de statues très connues dans les milieux des collectionneurs et qui seront très difficiles à vendre", a renchéri de son côté le directeur général de l’Institut. L’Icom a d’ores et déjà mobilisé son réseau de professionnels et les responsables culturels en Afrique afin qu’ils puissent vérifier sur place que les pièces volées n’apparaissent pas sur le marché illicite de l’objet africain, tandis qu’Interpol devrait émettre incessamment une notice internationale sur les œuvres disparues.
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Kinshasa : des pilleurs trop bien informés ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°40 du 13 juin 1997, avec le titre suivant : Kinshasa : des pilleurs trop bien informés ?