Les programmes des musées destinés aux scolaires et aux enfants ne cessent de se multiplier. Leur mise en œuvre efficiente reste difficile.
Cela fait bien longtemps que les musées ont compris la nécessité d’attirer le jeune public et mis en place des programmes adaptés. Mais entre les bonnes intentions affichées et l’efficacité réelle des actions de sensibilisation à l’art, il y a bien souvent un abîme. Les chiffres sont pourtant élogieux. Qu’ils concernent l’accueil des scolaires ou les ateliers d’enfants, qui constituent les deux filières principales, ils révèlent une forte fréquentation. Selon l’édition 2011 du Palmarès des musées du Journal des Arts, les scolaires venant en groupe représentent 14,6 % des visiteurs, soit près de 6 millions d’écoliers, collégiens ou lycéens (sur une population totale de 9 millions). Et encore il ne s’agit que d’une moyenne. Sans parler des musées de sciences ou d’histoire, dont c’est même la vocation première, de nombreux musées de beaux-arts affichent des taux autour de 40 % de scolaires. Ces pourcentages s’élèvent à 60 % pour ceux de Valenciennes ou Cambrai (Nord), à 45 % pour le Musée national de la Renaissance à Écouen (Val-d’Oise), à 44 % pour le Musée Matisse au Cateau-Cambrésis (Nord).
Salle dédiée
Les maires, lorsqu’il s’agit d’établissements municipaux, ont bien compris la nécessité de remplir leurs musées, qui sont désertés en semaine. Et ils le font d’autant plus volontiers qu’ils aident ainsi les enseignants (lire page 20) dans leur fonction d’éducation artistique. Le nombre d’ateliers pour enfants (lire page 19) est lui aussi remarquable. 58 % des musées classés dans le Palmarès disposent d’une salle dédiée avec une animation spécifique. Notre confrère Libération répertoriait dans son supplément « Paris Mômes » de septembre pas moins de 45 animations proposées dans les musées ou lieux d’art à Paris. Même les créateurs contemporains ont investi ce nouveau territoire, comme en témoigne l’exposition interactive « Blobterre » imaginée par Matali Crasset pour le Centre Pompidou (jusqu’au 5 mars 2012). Sans parler des expositions qui visent plus particulièrement ce public, comme celle sur les jouets (lire le JdA no 353, 23 sept. 2011, jusqu’au 23 janv. 2012) au Grand Palais ou « Babar » à la Bibliothèque nationale de France.
Un public hétérogène
Mais derrière ces chiffres flatteurs, combien de visites ennuyeuses, combien d’ateliers qui n’ont de liens avec l’art que par la structure qui les abrite ? Si notre enquête met en évidence quelques programmes réellement pensés pour les enfants, la marge de progression est importante. Cela tient à la nature même de ce public. Autant les adultes sont en capacité de pouvoir apprécier seuls une œuvre d’art, avec l’aide éventuelle d’un audioguide ou d’un panneau explicatif, autant les enfants ont besoin d’être encadrés. Et d’ailleurs il n’existe pas un public enfant mais autant de publics que de tranches d’âge. Le premier clivage s’opère entre les enfants qui savent lire et les autres, en général autour de 6 ans. Au-delà de 6 ans, difficile de regrouper dans un même atelier un élève de CE1 et un collégien en 5e. Bref, pour être efficace il paraît nécessaire de regrouper (comme le fait par exemple le Musée Carnavalet) les enfants sur des tranches d’âge très étroites, et d’adapter les animations et le discours des médiateurs en fonction (lire page 22). Pas facile pour des musées de taille moyenne aux moyens limités de former autant de personnels à des schémas pédagogiques spécifiques.
Les enseignants sont naturellement en première ligne et c’est sur eux que devraient porter les efforts les plus importants : stage de formation, mallettes pédagogiques, sites Web. Internet est à cet égard un formidable outil. La Réunion des musées nationaux vient de mettre en ligne (www.panoramadelart.com), un ensemble de fiches sur une sélection d’œuvres clefs de l’histoire de l’art. Plusieurs grands musées étoffent les rubriques pédagogiques de leurs sites. En revanche, du côté des sites pour enfants, à utiliser pour préparer la visite, l’offre est quasi inexistante. À peine peut-on relever « Archimôme » sur le site de la Cité de l’architecture et du patrimoine dont l’interface rappelle les premiers CD interactifs des années 1995-2000.
Élus, enseignants, directeur de musées, enseignants, tous sont désireux de bien faire. Le niveau d’exigence peut cependant être relevé. Parfois certaines mesures sont simples et peu coûteuses. Comme le rappelait récemment la Cour des comptes, le Metropolitan Museum of Art à New York offre un billet gratuit à tout visiteur scolaire pour qu’il revienne avec ses parents. Cette pratique est mise en œuvre par les musées d’Angers depuis plusieurs années déjà, avec les « bons de parrainage », une entrée remise aux enfants venus avec leur classe. Une véritable politique à l’égard du public enfant forme les visiteurs de demain et cible indirectement les adultes. Un effet de levier maximum.
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Jeune public, public exigeant
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°359 du 16 décembre 2011, avec le titre suivant : Jeune public, public exigeant