PARIS [07.05.15] - Le marchand d'art Guy Wildenstein a été renvoyé en correctionnelle, soupçonné d'avoir dissimulé au fisc une partie de la colossale succession de son père Daniel, décédé en 2001, ont annoncé jeudi à l'AFP des sources judiciaire et proche du dossier.
La fortune des Wildenstein, marchands d'art mondialement connus, est estimée à plusieurs milliards d'euros, composée en grande partie d'oeuvres d'art, notamment des toiles de maître, et de biens immobiliers, comme un îlot aux Iles Vierges ou une immense propriété au Kenya où a été tourné le film "Out of Africa".
Née d'un conflit familial, l'affaire avait connu à ses débuts un retentissement politique, Guy Wildenstein ayant été membre du Premier cercle, le groupe des riches donateurs de l'UMP.
Décoré en 2009 de la Légion d'Honneur par Nicolas Sarkozy, il a été le représentant UMP de la circonscription de Washington au sein de l'Assemblée des Français de l'étranger.
Guy Wildenstein sera jugé pour fraude fiscale et blanchiment aggravé, a indiqué une source judiciaire. L'ordonnance de renvoi a été signée le 9 avril par le juge d'instruction Guillaume Daïeff.
La belle-soeur de Guy Wildenstein, Liouba, comparaîtra pour complicité de blanchiment aggravé et son neveu Alec Junior pour fraude fiscale, a précisé la source judiciaire.
Deux trusts installés dans des paradis fiscaux, la Royal Bank of Canada Trust Company (Bahamas) et la Northern Trust Fiduciary Services (Guernesey), seront également jugés pour leur participation à l'élaboration de la fraude fiscale présumée, tout comme trois conseillers de la famille, deux notaires et un avocat suisse.
Selon une source proche du dossier, les enquêteurs considèrent Guy Wildenstein, qui réside aux Etats-Unis, comme "l'argentier" de la famille. Sollicité jeudi par l'AFP, son avocat s'est refusé à tout commentaire.
"Rôle majeur"
"Les actifs composant le patrimoine ont été déclarés à l'étranger et omis des déclarations de succession", explique la source proche du dossier. Or, "les témoignages mettent en lumière le rôle majeur de Guy Wildenstein", affirme-t-elle encore.
De même, les perquisitions ont permis de mettre au jour "les nombreux échanges de correspondance" évoquant des "montages frauduleux et (le) caractère secret des actifs à l'étranger", selon cette source.
Après la mort de Daniel Wildenstein, sa seconde épouse, Sylvia Roth-Wildenstein, s'estimant flouée par ses beaux-fils, avait contesté la succession, déposant plusieurs plaintes et évoquant l'existence de trusts. Elle est à son tour décédée en 2010. Mais le ministère du Budget avait déposé plainte en juillet 2011, après des critiques du PS, alors dans l'opposition, qui dénonçait son attentisme.
Signe de l'ampleur des faits reprochés, les Wildenstein se sont vu notifier en 2012, parallèlement à la procédure pénale, un redressement fiscal colossal de près de 600 millions d'euros, dont 250 millions pour Guy, redressement qu'il conteste.
Les enquêteurs soupçonnent que "les sommes soustraites à l'impôt ont été réintroduites sur le territoire français au moyen de montages sophistiqués, pour assurer un train de vie confortable aux héritiers qui n'ont déclaré que des faibles montants à l'administration fiscale française", selon une source proche du dossier.
Dans un autre dossier, Guy Wildenstein est, depuis juillet 2011, mis en examen pour "recel d'abus de confiance". Dans le cadre d'une perquisition menée dans l'enquête sur la succession, les enquêteurs avaient découvert à l'institut Wildenstein une trentaine d'oeuvres d'art qui avaient disparu, comme une huile du peintre impressionniste Berthe Morisot, évaluée à 800.000 euros et dont la trace s'était perdue il y a une vingtaine d'années.
Un des co-héritiers de la dernière propriétaire connue de cette oeuvre, Yves Rouart, avait alors porté plainte contre X pour "recel de vol".
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Fraude fiscale : le marchand d'art Guy Wildenstein renvoyé en correctionnelle
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Abonnez-vous dès 1 €Daniel Wildenstein (décédé en 2001) avec ses 2 fils, Guy (au centre) et Alec (décédé en 2008) - Photo Helmut Newton