Le Code prévoit des peines de prison ferme contre les activistes qui s’attaquent aux œuvres dans les musées, mais elles sont peu appliquées.
France. Depuis plusieurs années, des militants écologistes utilisent l’art pour mener leurs actions afin de dénoncer l’inaction des politiques face au changement climatique, à l’image récente de l’attaque contre Les Coquelicots de Claude Monet au Musée d’Orsay, le 1er juin 2024. Les sanctions pénales seraient jugées inefficaces par certains. Qu’en est-il ?
Afin de réprimer les actes de vandalisme, le droit offre un large arsenal législatif : l’article 322-3-1 du Code pénal prévoit que la destruction, la dégradation ou la détérioration d’un bien culturel – mais aussi la simple tentative – est punie de sept ans d’emprisonnement et d’une amende de 100 000 euros. Ces derniers peuvent être portés jusqu’à dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsque l’infraction est commise par plusieurs personnes. Les amendes peuvent être également élevées jusqu’à la moitié de la valeur du bien détruit, dégradé ou détérioré, indépendamment de l’éventuelle réparation civile.
En pratique, les rares condamnations ne sont pas de nature à dissuader les vandales. La jeune femme qui avait laissé une trace de lèvres sur une toile de Cy Twombly à la Collection Lambert en Avignon n’avait écopé que d’une amende de 1 500 euros et de 100 heures de travaux d’intérêt général, tandis que Pierre Pinoncelli qui avait dégradé « l’urinoir » de Marcel Duchamp au Centre Pompidou n’avait été condamné qu’à trois mois de prison avec sursis et deux ans de mise à l’épreuve. Les condamnations civiles aux frais de restauration des œuvres endommagées seraient également peu dissuasives, entre 14 000 et 19 000 euros.
En 2022, le député Alexandre Vincendet (Horizons et apparentés) avait vainement soutenu une proposition de loi afin d’alourdir les peines de manière drastique. Plus récemment (11 avril 2024), un nouveau texte a été déposé par la députée Caroline Parmentier (Rassemblement national). Néanmoins, ce dernier ne peut que prêter à sourire en ce qu’il prévoit de sanctionner les simples tentatives de vandalisme – ce que le droit permet déjà – et de prononcer une interdiction du territoire français pour les vandales « étrangers », mais sans alourdir les sanctions. Les infractions actuelles en matière de vandalisme sont moins lourdes que celles qui sanctionnent l’exportation illicite de biens culturels de « seulement » deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 450 000 euros !
Il y a quelques jours, la ministre de la Culture Rachida Dati a déclaré sur X (anciennement Twitter) souhaiter « la mise en œuvre d’une politique pénale adaptée à cette nouvelle forme de délinquance » (1er juin 2024). On en est encore loin : le parquet n’a requis que de simples peines avec sursis contre les deux activistes qui avaient jeté de la soupe sur un tableau de Claude Monet au Musée des beaux-arts de Lyon en février 2024, ou d’alternatives aux poursuites – comme la contribution citoyenne pour les militantes ayant aspergé La Joconde au Musée du Louvre en janvier 2024.
Il est vrai que le ministère public disposera toujours d’une latitude dans l’exécution de la politique pénale, notamment au regard de l’ordre public et de l’intérêt général, tout autant qu’aux libertés individuelles reconnues aux activistes. En effet, asperger ou taguer une œuvre d’art au nom de la défense de l’environnement pourrait-il relever de la liberté d’expression ? Depuis 2022, la Cour de cassation semble répondre par la négative à propos des « décrocheurs » du portrait du président de la République. La solution serait-elle la même pour ces nouveaux éco-vandales dans les musées ?
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Éco-vandalisme : quelles sont les sanctions pénales ?
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°636 du 21 juin 2024, avec le titre suivant : Éco-vandalisme : quelles sont les sanctions pénales ?