Difficile de croire de prime abord que derrière ce gentleman se cache un univers débridé. Une logique du « pare-feu » qui structure toute la construction de la vie d’artiste d’Alain Séchas, aujourd’hui quinquagénaire.
Lorsqu’il engage ses études à l’École normale supérieure technique, il a déjà une idée en tête : « Tout de suite, j’ai voulu être artiste. » Ce sera juste un peu plus long pour y arriver puisqu’à la sortie de l’école, il enseigne en lycée et en collège le dessin. Déjà. Pourtant les premières œuvres que son salaire de professeur lui permet de produire sont des sculptures. Des œuvres éphémères et graciles dont l’équilibre précaire habitait des appartements de Metz en 1983.
Des rencontres déterminantes
Il ne faudra pas longtemps à Alain Séchas, discret mais déterminé, pour faire de premières rencontres déterminantes, notamment avec l’artiste Bernard Bazile. Leurs longues discussions sur l’art confortent le jeune homme dans la direction qu’il vient de prendre. Et très vite, en 1985, il expose seul puis aux côtés de Jeff Koons, Jon Kessler, Thomas Schütte et du duo Bazile/Bustamante, déjà à la galerie Crousel-Hussenot. Dans ces débuts, n’y cherchez pas les chats qui aujourd’hui ont fait sa légende. Il est question de sculpture, d’échelle et de format, de peinture aussi.
En 1990, il franchit une première étape formelle. La Pieuvre, gigantesque sculpture de polyester blanc dont les détails sont dessinés, détermine son vocabulaire des formes. Les personnages sont blancs, quelques coups de crayon leur donnent souvent l’air abruti et les commentaires qui commencent à les accompagner sont sans pitié.
Séchas et ses chats
Le chat débarque en 1997, jeu de mots avec le nom de l’auteur. L’animal blanc, les yeux écarquillés s’en prend plein la poire. Comme inversement proportionnel au langage soigné et élégant d’Alain Séchas, les phrases adjointes aux sculptures et aux dessins muraux se délectent de trivialité et d’un humour corrosif.
La première fois que l’on rencontre l’auteur de ce bestiaire félin et martien, on s’attend à des rafales de calembours, à un homme qui crayonne sans arrêt. Mais l’artiste est à mille lieues de ces clichés. Tout est très canalisé. Le dessin n’est jamais compulsif. Parfois même poussif, il l’avoue. Les dérapages verbaux de son univers artistique sont parfaitement contrôlés. Ils traduisent l’acuité visuelle de leur auteur, fin observateur.
« Chaque jour, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. » La petite phrase hypnotique répétée dans une sculpture cinétique créée en hommage à Émile Coué est d’une redoutable efficacité. Alain Séchas revient en pleine forme chez Chantal Crousel, galeriste de ses débuts. Un an d’œuvres y sera exposé, dévoilant plusieurs séries, réflexions sur le format et le faire. Des néons, des grands tableaux, de petits dessins, une sculpture géante de Platée, reine des grenouilles, sexy et martienne, à quelques jours du jour J, Alain Séchas en parle avec beaucoup de plaisir et une pointe d’impatience. La volonté est intacte, sans une pointe de lassitude.
1955 Naissance à Colombes.
1975 Il est admis à l’École normale supérieure technique.
1983 Parallèlement à l’enseignement du dessin, il réalise ses premières sculptures.
1985 Le Mannequin est l’exemple parfait de sa quête d’humour et de désordre.
1997 Naissance de son premier Chat.
2001 Monographie au musée d’Art moderne et contemporain à Strasbourg.
2005 Inauguration de La cycliste dans le centre-ville de Bruxelles.
2006 Alain Séchas vit et travaille à Paris. Il expose à la galerie Chantal Crousel jusqu’en décembre.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Alain Séchas, Docteur Jekyll et Mister Hyde
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°585 du 1 novembre 2006, avec le titre suivant : Alain Séchas, Docteur Jekyll et Mister Hyde