Un nouveau Coypel à Versailles

A partir de juin 2012, les visiteurs du Château de Versailles pourront admirer une nouvelle œuvre dans la Galerie de l’histoire du palais. Le char de Jupiter entre la Justice et la Piété, petite huile sur toile de Noël Coypel (1628-1707), a en effet été acquise par l’Etablissement Public lors d’une vente de gré à gré organisée par la maison de vente Artcurial. Ce type de transaction, qui permet de céder une œuvre sans passer par les enchères, est ouvert aux commissaires-priseurs français depuis l’entrée en vigueur de la loi de libéralisation des ventes aux enchères, le 1er septembre dernier. Versailles acquiert ainsi le tableau pour un prix relativement modique, tandis qu’Artcurial, en renonçant à une partie de ses frais sur la vente, cultive son image de maison proche du patrimoine français. Francis Briest, son co-président, parle de « patriotisme culturel » ; côté Versailles, on salue une « collaboration fructueuse, un partenariat efficace », qui permet au musée de posséder à présent l’une des rares esquisses préparatoires aux grands décors du palais.

Mises à part quelques lettres du roi aux architectes, ces petits tableaux sont en effet le seul moyen de connaître l’élaboration des décors du palais. Coypel réalise vraisemblablement le sien en 1671, et fait ainsi valider le panneau central du décor qu’il a conçu pour le Grand cabinet du roi. Celui-ci sera finalement installé dans la salle des Gardes de la Reine. Comme sur la miniature, on y retrouve Jupiter sur son char, entouré de la Justice, de la Piété et d’allégories astrologiques. Mais quelques détails diffèrent, le geste du dieu, la position d’un aigle… Ils seront d’autant plus visibles après les travaux de restauration de ce plafond en très mauvais état, prévus à la fin de l’année. L’esquisse de Coypel sera quant à elle présentée dès juin dans la Galerie de l’histoire, prochainement ouverte.

Outre son importance sur le plan historique, ce retour du tableau à Versailles permet également de respecter le vœu de son précédent propriétaire : l’historien de l’art Jacques Thuillier, disparu en octobre dernier. Ce dernier, qui conservait l’esquisse dans sa chambre selon les dires de son ancien élève Serge Lemoine, aurait toujours destiné l’œuvre au château. Alors ne l’aurait-il pas plutôt donnée, lui qui fit généreusement don de quantité d’œuvres aux musées de Nancy et de Vic-sur-Seille ? « Peut-être », répond l’ancien directeur du Musée d’Orsay, aujourd’hui conseiller culturel et scientifique de la maison Artcurial, « mais il est mort sans rien laisser d’écrit, on ne saura jamais. Cette transaction respecte en tout cas parfaitement le souhait qu’il avait formulé de son vivant ».