MADRID (ESPAGNE) [13.12.13] – Le projet du futur Musée des Arts, de l’Architecture, du Design, et de l’Urbanisme qui doit s’implanter dans le quartier des musées non loin du Prado, soutenu par la municipalité, a déclenché de vives réactions au sein de la communauté scientifique. Selon ses détracteurs, le projet est obscur, et servirait uniquement les intérêts privés de son concepteur, l’architecte Emilio Ambasz.
Le futur grand Musée des Arts, de l’Architecture, du Design, et de l’Urbanisme (Maadu) qui doit s’implanter non loin du Prado à Madrid, au 30 Paseo del Prado, sur une surface de 3 672 mètres carrés et sur une hauteur de 5 étages a déclenché les foudres de la communauté scientifique selon le quotidien espagnol El País. Des voix se sont élevées contre ce projet coûteux qui paraît servir les intérêts personnels de l’architecte argentin Emilio Ambasz.
C’est d’abord le procédé utilisé par la municipalité pour autoriser l’implantation de ce nouvel édifice qui a choqué. Celle-ci aurait modifié opportunément une loi pour pouvoir autoriser la démolition d’un immeuble classé sur la parcelle concernée, au motif que l’édifice était insalubre, peu adapté à une réhabilitation, et rempli d’amiante. Le nouveau projet, dont le budget a été évalué à un minimum de 4,5 millions d’euros paraît ambitieux, et semble avoir séduit la municipalité.
Cet édifice a été initialement présenté par son concepteur, comme un musée dédié à l’architecture, au design et à l’urbanisme. Respectueux de l’environnement, les façades principales, tel un tapis de verdure, doivent être couvertes de plantes en pots, facilement interchangeables, dont la fonction principale est de rafraîchir les murs, et de limiter l’usage de la climatisation les jours de chaleur. Sur le toit, d’autres bandes de verdures sont prévues pour recueillir les eaux de pluie. Au sommet de l’immeuble, un restaurant doit aussi ouvrir, avec un accès possible directement de la rue. Etant donné son emplacement, il est clair que les retombées économiques d’un tel établissement peuvent être non négligeables, ce qui a dû rendre ce projet encore plus séduisant.
Mais pour Miguel Angel Díaz Camacho, président de l’ASA (Asociacíon Arquitectura y Sostenibilidad), la démolition de l’immeuble, malgré sa vétusté, n’est pas justifiée, et traduit un phénomène de mode qui tend au « cannibalisme urbanistique », sous couvert d’une caution environnementale factice fournie par les tapis de verdure. A cela s’ajoute les frais annuels liés à l’entretien de ces plantes, qui pourrait coûter 40 000 euros par an à la municipalité.
Autre ombre au tableau, le projet scientifique serait intimement lié à la personnalité d’Emilio Ambasz, qui aurait prévu de consacrer 5,5 millions de son propre budget pour l’établissement du contenu de ce musée, selon un article d’El País de mars 2013. C’est aussi la Fondation Emilio Ambasz qui aurait pris en charge le dessin du projet, sa construction, et sa future administration, pour une durée de 75 ans. Ce mélange des genres gêne les détracteurs du musée, qui voient davantage en lui un instrument d’autopromotion qu’une réelle institution à vocation scientifique, d’autant plus que le directeur de la fondation n’est autre qu’Ambasz lui-même. En outre, l’architecte ne semble pas avoir jugé nécessaire de s’entourer d’un collectif d’architectes, ni de communiquer sur le contenu du futur complexe muséal.
Le doyen du Collège des Architectes de Madrid s’étonne que l’on prenne au sérieux ce projet « qui ne peut s’appeler Musée de l’Architecture parce qu’il ne s’est appuyé ni sur les architectes, ni sur les écoles spécialisées, qui conservent les travaux des élèves les plus prestigieux. » De même, Ricardo Aroca, ancien directeur de l’Ecole d’Architecture de Madrid et ancien doyen du Collège des Architectes trouve étrange que la municipalité soutienne un monument « à la gloire d’Ambasz ».
Emilio Ambasz a fait ses études à l’Université de Princeton. Commissaire d’exposition pour la section design du Museum of Modern Art de New York entre 1970 et 1976, il est à l’origine de plusieurs expositions reconnues comme « Italy, the new domestic landscape » en 1972 et « The Architecture of Luis Barragan » en 1974. Il a reçu de nombreux prix en tant que designer industriel et fut en 2000 lauréat du prix délivré par The American Institute of Architects/Business week Architectural Award pour son Fukuoka International Hall, à Fukuoka au Japon. Ce même édifice a eu le premier prix de l’architecture environnementale de l’Institut Japonais des Architectes en 2001. Ambasz s’est surtout fait connaître pour son approche environnementale de l’architecture.
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Un musée à la gloire de l’architecte Emilio Ambasz dans le quartier des arts à Madrid ?
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Abonnez-vous dès 1 €Vue de Madrid - © Photo Enrique Dans - 2007 - Licence CC BY-SA 2.0