La foire Art Moscou succombe face aux évènements en Russie

Il n'y aura pas d'édition 2014 pour la plus ancienne foire d'art contemporain en Russie. Créée en 1996 par l'entrepreneur et architecte Vassili Bytchkov, Art Moscou hésite à poursuivre dans un marché profondément déprimé par le départ des grands collectionneurs. Le coup de grâce a été porté par la Vienna Art Fair, qui se déroule quasi simultanément. Depuis que cette dernière est contrôlée par l'homme d'affaires Sergueï Skaterschikov, le marché russe s'est déplacé encore un peu plus à l'Ouest.

Au cours de ses dix-huit éditions, Art Moscou n'est parvenue qu'une seule fois à dégager un bénéfice (fort modeste : 4000 euros!) en 2007, à l'apogée du marché russe. 70 galeries avaient alors participé. Cette année, Vassili Bytchkov indique n'avoir reçu qu'une trentaine d'offres de galeries pour un événement censé se dérouler ce mois-ci. « Les participants étrangers n'ont pas envie de venir à Moscou et les galeries russes ne sont pas prêtes à verser la somme nécessaire pour prendre part à la foire ».

Mais au-delà des raisons purement économiques, le contexte politique domestique et international a joué un rôle important. Les organisateurs de la foire confient que les sanctions occidentales contre la Russie découragent les galeries étrangères. Vassili Bytchkov, qui organise parallèlement d'autres foires (architecture, antiquités), note que plusieurs exposants étrangers ont déclaré forfait cette année pour des raisons politiques.

En outre l'isolationnisme et le conservatisme de plus en plus virulent du gouvernement russe pèse encore davantage sur l'atmosphère. Les films sont censurés, des spectacles sont supprimés. L'édition 2013 d'Art Moscou avait déjà été inspectée officieusement par les longues barbes du synode patriarcal, vérifiant la conformité des œuvres d'art contemporain avec les nouvelles valeurs imposées à la société russe par le clergé orthodoxe. Après l'affaire Pussy Riot, chacun sait désormais de quel côté penche la justice russe et l'autocensure est de rigueur chez la grande majorité des galeristes. Rien de tel pour encourager les collectionneurs à aller acheter à l'étranger.