HONG KONG [24.05.13] - Art Basel Hong Kong se déroule du 22 au 26 mai. Si son lancement rappelle celui de l’édition américaine, son ambiance est très différente, en raison notamment de la prédominance des galeries et artistes asiatiques, raconte Frédéric Bonnet, notre envoyé spécial.
Comme à Miami en 2002, lors du lancement de Art Basel Miami Beach, des larges affiches et des drapeaux ont fleuri en centre ville et dès l’aéroport. Comme à Miami le public local, curieux, est venu nombreux découvrir dès le jour du vernissage, mercredi 22 mai, le visage de la petite dernière de la famille. Comme à Miami, un certain art du paraître et du bling bling savent à merveille s’accommoder.
Et comme à Miami, les acteurs culturels locaux se sont emparés de l’événement afin d’en faire une véritable semaine de l’art : alors que se sont enchainés les vernissages – Angela Bulloch chez Simon Lee, Jake & Dinos Chapman chez White Cube, Takashi Murakami et Xavier Veilhan chez Perrotin, entre autres – était dévoilée une très sèche et exigeante mais néanmoins remarquable exposition, « I think it rains », organisée par la Burger Collection dans un espace alternatif, le Cattle Depot Artist Village, loin de l’aspect lisse et policé du centre ville.
De même qu’avec « Inflation ! », une exposition de quelques sculptures gonflables décevante car manquant véritablement de corps si ce n’est de propos, était livrée au public le site du futur M , le nouveau musée pour la culture visuelle dans le district de West Kowloon, prévu pour ouvrir en 2017 : un établissement colossal que son directeur Lars Nittve annonce grand comme trois fois la Tate Modern, et dont le nom de l’architecte devrait être révélé dans le courant de l’été, choisi dans une « shortlist » comprenant les six noms de Herzog & De Meuron, Renzo Piano, Shigeru Ban, Toyo Ito, Kazuyo Sejima & Ryue Nishikawa et SNOHETTA.
Mais quoique marquée du sceau « Art Basel », signature désormais internationalement reconnue, la petite sœur hongkongaise prenant la suite de ART HK apparaît bien différente.
Une homogénéisation dans la communication visuelle, la signalétique et les aménagements donne certes un air de…, mais qui finalement n’est qu’en surface. Car pour sa première édition qui se tient jusqu’au 26 mai, Art Basel Hong Kong n’offre en rien l’image d’un énième succédané.
D’abord dans l’atmosphère. Point de rush ici, nulle foule piaffant devant les portes avant l’ouverture, mais un flux tranquille s’écoulant dans les allées ; l’Asie bien entendu. Dans la clientèle également. Si les européens semblent venus non pas en masse mais en nombre, très peu d’américains ont fait le voyage. Hong Kong étant en outre d’un accès aisé, nombre de collectionneurs asiatiques sont de la partie : malaisiens, indonésiens, chinois pour beaucoup. Des indiens également. Le tout est renforcé, ce qui réjouit plusieurs marchands, par une importante présence de collectionneurs australiens qui ne font pas les déplacements de Bâle ou Miami nécessitant environ 24 heures de voyage alors qu’ils ne sont « que » à neuf heures de Hong Kong.
Enfin dans le contenu. Voir une bonne moitié de galeries asiatiques, sur les 245 que compte le salon, impacte évidemment – et pas qu’un peu – la physionomie d’un salon arpenté par un œil occidental. 47 d’entre elles sont en outre regroupées dans un secteur facilement identifié intitulé « Insight », dans lequel elles présentent des projets curatés.
Quelques belles surprises, y sont à glaner, qui permettent de déjouer certains clichés entretenus à propos de l’art asiatique. Ainsi le travail de Halley Cheng chez Ora-Ora (Hong Kong), qui développe des micro-narrations avec des motifs éparpillés sur des panneaux de bois, ou Yan Bing (Yang, Beijin) évoquant les tiraillements entre monde rural et urbanisation forcée avec des outils agricoles reconnaissables à leur forme mais littéralement « habillés » dans des costumes de ville.
Du côté des galeries occidentales, c’est manifestement une certaine prudence qui prévaut, avec des accrochages clairs comprenant souvent peu d’œuvres ni de grandes installations… et pas non plus d’œuvres majeures, toujours mise de côté pour Art Basel… à Bâle ! Si elle pourrait passer pour de la frilosité sous d’autres cieux, cette prudence apparaît logique voire nécessaire dans un contexte asiatique où les comportements d’achat ne sont pas encore intégrés par les marchands et où le public doit être éduqué à un art qu’il ne connaît pas. Olivier Bélot, directeur de Yvon Lambert (Paris), résume parfaitement la situation : « Cela fait trois ans que nous sommes présents et chaque fois c’est un peu mieux, mais c’est une foire qui se fait sur la durée, il ne faut pas se raconter d’histoires. Nos artistes connus ne le sont pas ici, cela nous contraint à l’humilité et à réapprendre notre travail, nous essayons donc de simplifier la lecture des stands. Nos certitudes sont bousculées, et finalement ce n’est pas mal ! ».
Certains n’ont toutefois pas hésité à établir des rencontres parfois subtiles, comme les découpes murales de Kara Walker et les céramiques d’Arlene Shechet chez Sikkema Jenkins (New York), ou plus décoiffantes mais pas moins pertinentes, tels les tableaux de A.R. Penck accrochés sur papier peint multicolore d’Aaron Curry chez Michael Werner (New York).
Si des transactions, parfois à des prix élevés, ont déjà été enregistrées dès le premier jour, un bon bilan est loin d’être assuré car pour beaucoup d’enseignes les choses vont très lentement. Les spécialistes de la région savent bien que, là encore, les choses se font sur la durée.
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Lever de rideau d’Art Basel Hong Kong
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