Dans le cadre du lancement de la cinquième édition du Printemps des musées, le ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon a inauguré le 3 mai à Épinal (Vosges) le Musée de l’image. L’institution municipale collabore étroitement avec la célèbre Imagerie d’Épinal, entreprise privée sauvée de la faillite il y a une dizaine d’année.
EPINAL - Quelque peu perturbée par une quarantaine de manifestants – intermittents du spectacle et archéologues inquiets de la réduction des budgets qui leur sont alloués –, l’inauguration du Musée de l’image d’Épinal a eu lieu le 3 mai en présence du ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon. Le nouvel édifice, dont la façade a été réalisée tout en transparence, a élu demeure sur le site de l’Imagerie d’Épinal, autrefois appelée “Pellerin” (lire l’encadré). Dernière imagerie de France, l’entreprise fit faillite en 1980, après deux cents ans d’existence. Elle fut alors reprise par une cinquantaine d’actionnaires spinaliens et par la Ville qui, en 1989, racheta les bâtiments. Aujourd’hui, l’institution municipale et l’entreprise privée cohabitent étroitement. Du musée, le visiteur peut directement accéder à l’Imagerie – où sont régulièrement organisées des visites guidées –, et à sa boutique. La réhabilitation du site, ainsi que la construction et l’aménagement du musée, ont coûté 8,2 millions d’euros, répartis entre la Ville, la Région Lorraine, le Feder (Fonds européen de développement régional) et le département des Vosges. Si certains reprochent une confusion entre entreprise à but lucratif et projet culturel, la municipalité préfère y voir “la prise de conscience des pouvoirs publics de la richesse du patrimoine de la ville” et, accessoirement, un bon moyen de relancer le tourisme dans une région peu fréquentée. L’ouverture du musée s’inscrit dans un plan de revalorisation du quartier du port. Après le rachat de l’usine, la Ville a rasé les bâtiments avoisinants et les abattoirs. De nouvelles habitations y sont en cours de construction.
Le rôle des images
Le fonds du nouveau musée compte quelque 23 000 pièces du XVIIe au XXe siècle, provenant des centres imagiers français et étrangers et, pour un tiers, de la célèbre Imagerie d’Épinal. Située au premier étage, la salle d’exposition permanente développe, sur 400 m2, des thématiques générales (“Censurer”, “Préserver”, “Créer”, “Informer et désinformer”, “Édifier”...) analysant notre rapport aux images populaires, les différentes manières dont elles ont été perçues et utilisées au fil du temps. “Nous profitons de l’histoire de l’Imagerie pour aller au-delà, et voir quelles sont nos icônes contemporaines”, explique le conservateur Martine Sadion. Se côtoient ainsi, regroupées sous le thème “Information et désinformation”, L’Entrée de Napoléon à Grenoble (Épinal, fin XIXe siècle), une représentation du maréchal Pétain (1941) et une couverture récente d’un magazine sur la guerre en Irak, nous interrogeant plus largement sur la notion de propagande. Chaque vitrine fait appel à nos souvenirs, à la mémoire qui a gravé de manière indélébile certains clichés, comme celui du Chat Botté diffusé par l’Imagerie Pellerin.
Par souci de conservation, les pièces de la collection ne peuvent être exposées plus de trois mois, et seront donc présentées par rotation. D’ici environ cinq ans, l’installation permanente actuelle sera entièrement renouvelée. Les deux autres salles du bâtiment (au rez-de-chaussée et au premier étage) accueilleront des expositions temporaires, considérant l’image dans ses rapports aux différentes disciplines. L’institution compte aussi passer commande à plusieurs artistes contemporains. Pour l’heure, le musée explore les images d’épopée de la série napoléonienne (1829-1845), et leur rôle dans l’édification du mythe impérial.
À la fin du XVIIIe siècle, Jean-Charles Pellerin lance une série d’images gravées dans une planche de bois, qui sont ensuite coloriées à l’aide d’un pochoir. D’abord religieux, les sujets deviennent historiques puis narratifs. L’entreprise connaît tout au long du XIXe siècle un formidable essor, adaptant sa production aux modes populaires. Pendant l’entre-deux-guerres, le développement de nouveaux moyens de communication (journaux illustrés, magazine) comme celui de la photographie et de la radio entraîne son déclin. En 1984, sauvée de justesse par des financiers, l’Imagerie Pellerin devient l’Imagerie d’Épinal. Elle continue aujourd’hui de produire des images anciennes et se diversifie en éditant également des artistes contemporains. Il est possible de visiter ses ateliers qui fonctionnent toujours à l’ancienne (un billet groupé permet d’accéder à l’usine et au musée).
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Une cité pour l’image
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Abonnez-vous dès 1 €Musée de l’image, 42 quai de Dogneville, 88000 Épinal, tél. 03 29 81 48 30, tlj 9h30-12h et 14h-18h, vendredi 9h30-18h, dimanche 10h-18h, du 1er juillet au 31 août, tlj 9h30-12h30 et 13h30-18h30, vendredi et dimanche horaires inchangés. À voir : “Napoléon, images d’une légende�?, jusqu’au 1er septembre.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°171 du 16 mai 2003, avec le titre suivant : Une cité pour l’image