La collection de dessins et peintures du XVIIe siècle de Pierre Rosenberg donnée aux Hauts-de-Seine prendra place au sein de la caserne Sully.
Saint-Cloud. Les œuvres de Pierre Rosenberg n’iront pas aux Andelys, mais à Saint-Cloud. En 2017, l’ex-président-directeur du Louvre avait annoncé sa volonté de faire don de sa riche collection au département de l’Eure. L’octogénaire souhaitait que les peintures et les dessins, principalement du XVIIe siècle, qu’il a réunis années après années deviennent le noyau d’un musée consacré à Nicolas Poussin et au Grand Siècle, qui aurait pu s’installer dans l’hôpital désaffecté de la ville natale de Poussin. D’abord intéressées, les collectivités territoriales se sont peu à peu désengagées du projet. « Trop coûteux pour elles », explique aujourd’hui Guillaume Kientz, ex-conservateur au Louvre, qui fut chargé de tracer les contours du musée andelysien. « Les collectivités avaient proposé que le bâtiment abrite aussi un hôtel », indique-t-il, précisant que cette idée n’avait rencontré ni ses faveurs ni celle du collectionneur. C’est Patrick Devedjian qui a offert à Pierre Rosenberg une alternative au projet normand avorté. L’avocat et ancien ministre connaît l’ex-patron du Louvre depuis longtemps. L’homme politique est lui-même collectionneur de dessins du XVIIe siècle (« modeste » selon ses dires) et vice-président de la Société des Amis du Louvre. Il est surtout le président d’un des départements les plus riches de France : les Hauts-de-Seine.
L’annonce a été faite au cours du Festival d’histoire de l’art le 8 juin : 2 000 dessins du XVIIe siècle et 900 tableaux du XVIIe à nos jours de la collection Rosenberg deviendront propriété de ce département voisin de Paris et seront présentés au sein d’un nouvel équipement culturel, qui prendra place dans la caserne Sully. Situé en bord de Seine à l’entrée du parc de Saint-Cloud, cet édifice construit sous Charles X n’avait plus d’attribution depuis le départ de la Direction générale de l’armement en 2008. Racheté en 2016 par le Conseil départemental, le bâtiment de plus de 11 000 m2 facilement réhabilitable, car sans intérêt à l’intérieur, devait initialement accueillir les Archives de la collectivité et ses abords devaient recevoir la construction de logements sociaux. Ces deux projets sont aujourd’hui balayés : les Archives des Hauts-de-Seine partiront dans les Yvelines (à la faveur d’une fusion envisagée entre les deux départements d’Île-de-France) et les logements devront être recasés « ailleurs à Saint-Cloud », selon Patrick Devedjian.
La caserne Sully aura une vocation exclusivement tournée vers l’histoire de l’art. C’est peu dire que le projet, piloté aujourd’hui par l’universitaire dix-septièmiste et dix-huitiémisme Alexandre Gady (Guillaume Kientz s’en est allé outre-Atlantique, lire JdA n° 517) est ambitieux. Il comprend surtout un Musée du Grand Siècle qui abordera l’une après l’autre, sous l’angle artistique, les grandes thématiques du XVIIe siècle.
La réussite de l’entreprise dépend largement du fait de bénéficier de dépôts de la part d’institutions muséales. La collection Rosenberg a beau être riche de dessins de tous les grands maîtres de l’époque, elle ne permet pas une vision d’ensemble de l’art du XVIIe siècle. Celle qui abrite tout de même un tableau de Vouet, de Champaigne et un Lebrun notables, manque en effet de peintures de grands formats, et est également lacunaire en mobilier et en sculpture. Parmi les œuvres qu’Alexandre Gady a dans le viseur : des toiles de grand format que les autres institutions gardent en réserve, faute de place pour les accrocher sur leurs murs. Il ne cache pas que l’avenir du projet passe aussi dans des acquisitions. Il espère voir le musée se doter d’un tableau de Poussin (il n’y en a aucun dans le fonds Rosenberg). « Nous en pistons un ou deux chez des particuliers », indique-t-il.
Outre ce parcours consacré au Grand Siècle, la caserne Sully abritera aussi un centre d’études (Pierre Rosenberg prévoit de donner également sa documentation), qui fera l’objet d’un accord de coopération avec l’université de Nanterre et un « musée des collectionneurs », où la figure de Pierre Rosenberg et sa collection post-XVIIe siècle sera mise en exergue. D’autres collectionneurs privés auraient manifesté leur souhait de rejoindre les cimaises dans le cadre d’une donation. Les travaux devraient débuter en 2020 pour une ouverture espérée de l’institution en 2024, un scénario très optimiste. Alexandre Gady qui prendra officiellement ses fonctions de pilote du projet pour cinq ans en septembre est naturellement pressenti pour diriger le lieu à son ouverture.
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Un musée du Grand Siècle à Saint-Cloud
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°526 du 21 juin 2019, avec le titre suivant : Un musée du Grand Siècle à Saint-Cloud