PARIS
Le brillant historien, spécialiste reconnu dans le domaine des discriminations raciales, va diriger l’entité qui réunit le Musée national de l’histoire de l’immigration et l’Aquarium tropical.
Paris.« Quant à Emmanuel Macron, s’il lui arrive de s’exprimer avec éloquence comme lors du 10 mai, à propos de la mémoire de l’esclavage, on peine à discerner une politique, ou même un point de vue consistant [sur la discrimination raciale] », déclarait Pap Ndiaye dans un entretien publié dans le journal Le Monde en 2019. L’intéressé ne semble pas lui en vouloir pour ses propos, car il vient d’approuver sa nomination à la direction générale de l’établissement public de la Porte-Dorée, qui regroupe le Musée national de l’histoire de l’immigration et l’Aquarium tropical.
Cette nomination est une chance pour un lieu en recherche de marqueurs. Pap Ndiaye appartient à cette intelligentsia française très en vue aujourd’hui pour ses travaux sur les discriminations raciales. Prépa littéraire au prestigieux lycée Henri-IV, élève à Normale-Sup, agrégé et docteur en histoire, une formation suivie d’un séjour de plusieurs années aux États-Unis où il travaille sur la condition des Noirs américains. À son retour en France en 1998, il devient enseignant à l’École des hautes études en sciences sociales et depuis quelque temps à Science Po Paris. Né en France d’une mère française (blanche) et d’un père sénégalais (noir) qui a abandonné très tôt sa famille, il est le produit et le symbole d’une culture métissée ayant bénéficié de l’ascenseur social français. Tout comme sa sœur, l’écrivaine Marie Ndiaye, qui a obtenu le prix Femina en 2001 et le prix Goncourt en 2009.
Dans la république des lettres, il y a toujours un livre fondateur qui propulse son auteur sur le devant de la scène ; pour l’universitaire, c’est en 2008 La Condition noire : essai sur une minorité française. Plus tard, Cécile Debray, alors conservatrice au Musée d’Orsay, fait appel à lui pour être conseiller scientifique de l’exposition « Le modèle noir » (2019).
Ce changement de trajectoire est cependant risqué pour Pap Ndiaye qui, à 56 ans, va passer du statut d’observateur et enseignant à la gestion quotidienne d’un établissement public. D’autant que le lieu n’est pas facile. Voulue par Jacques Chirac en 2002, la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (selon son nom à l’époque) ouvre en 2007 dans un bâtiment construit en 1931 dans l’Est parisien pour célébrer les colonies et qui abrite un immense aquarium. Les deux structures ne sont réunies qu’en 2012 dans une même enveloppe juridique afin de simplifier la direction quotidienne du Palais de la porte Dorée. Un lieu dual donc, qui commençait à s’installer dans le paysage culturel (avant le Covid-19) avec 525 000 visiteurs en 2019 (+ 14 % par rapport à 2018) mais seulement 146 000 pour le musée, essentiellement pour les expositions temporaires. Un nouveau parcours permanent doit cependant ouvrir en 2021. Ses moyens, alloués par sa double tutelle, ministère de la Culture et ministère de l’Éducation, sont chiches.
Pap Ndiaye succède à Hélène Orain, en poste depuis 2015 (et « appelée à d’autres fonctions » selon la Rue de Valois), alors que les équipes ont beaucoup bougé ces derniers temps. Un nouveau directeur du musée, Sébastien Gokalp, est arrivé en 2019 tandis que Benjamin Stora a été remplacé en janvier 2020 à la tête du conseil d’orientation par François Héran. Mercedes Erra, qui préside l’établissement public depuis 2010, est maintenant la plus ancienne dans l’équipe de direction.
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Pap Ndiaye, une figure intellectuelle à la tête du Palais de la porte Dorée
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°561 du 19 février 2021, avec le titre suivant : Pap Ndiaye, une figure intellectuelle à la tête du Palais de la porte Dorée