NEW DELHI / INDE
Le réaménagement urbain voulu par le Premier ministre fait l’objet de vives polémiques dans un pays ravagé par la pandémie de covid.
Le Premier ministre indien Narendra Modi veut réaménager une partie de la capitale et construire un nouvel édifice pour le parlement, des bureaux et résidences gouvernementaux sur un pan du boulevard Rajpath. Problème : cela suppose de détruire et reconstruire ailleurs trois musées : le Musée national de l'Inde, le Centre national des arts Indira Gandhi et l'annexe des Archives nationales.
La construction du nouvel édifice parlementaire à la place de l’ancien bâtiment du XXe siècle a déjà commencé en décembre, tandis que les appels d’offres sont ouverts depuis avril pour la construction du Secrétariat central à l’emplacement du Centre Indira Gandhi. Ce dernier, une fois détruit, devrait être reconstruit un kilomètre plus loin sur le même boulevard. Le Musée national devrait être quant à lui déplacé dans un quartier de bureaux, les North et South Blocks.
Intitulé « Central Vista Redevelopment Project », du nom du quartier, le projet suscite l’indignation d’universitaires et artistes indiens et étrangers – dont Anish Kapoor -, rapporte le site Hyperallergic. Dans une lettre ouverte, 76 d’entre eux alertent sur la menace que représente un tel plan pour le patrimoine culturel de l’Inde, s’interrogeant sur son coût très élevé (2,2 Md€) alors que le pays lutte désespérément contre les ravages du covid. Après avoir qualifié le projet d’« extravagant », accusé de « mettre en danger des travailleurs et gaspiller des ressources rares qui pourraient être utilisées pour sauver des vies », les signataires demandent au gouvernement de reconsidérer sa décision.
Selon eux, la délocalisation des musées pose plusieurs problèmes : la destruction d’une construction originale, héritage patrimonial indien, le risque de perte ou de dommages d’objets ou documents témoins de l’histoire du pays, et enfin la séparation de trois lieux culturels initialement voisins.
Les signataires de la lettre ouverte tentent d’attirer l’attention du gouvernement sur les risques qu’un tel chantier précipité, dont la fin est fixée à 2024, fait peser sur les collections à déménager. Le laps de temps n’est pas suffisant pour établir un inventaire et bilan sanitaire général de tous les objets et œuvres conservés dans les différentes institutions avant leur transport. La grave crise sanitaire que traverse actuellement le pays complexifie une opération déjà délicate par nature.
Ils déplorent le manque de transparence et l’absence de consultations préalables à cette décision, s’inquiétant des modalités de déménagement, de conservation et d’accessibilité au public des collections une fois délocalisées.
Le Premier ministre Modi justifie ce projet en invoquant une nécessaire modernisation des bâtiments gouvernementaux, une adaptation « aux besoins d’une Inde nouvelle » libérée de son passé colonial symbolisé dans l’architecture des bâtiments à raser. Le projet est d’ailleurs qualifié de « service public essentiel ».
L’opposition critique avec virulence ce projet qui serait un prétexte utilisé par Modi pour laisser son empreinte sur la ville, en toute indifférence pour la crise sanitaire sans précédent que traverse son pays. Sur twitter, ils saupoudrent leurs commentaires acides avec des hashtags #ModiMahal #ModiAntoinette rapporte le quotidien IndiaToday.
Des demandes de suspension des travaux ont été déposées devant la Cour Suprême, ainsi que des pétitions invoquant les risques pour la santé des travailleurs. Malgré cela, le chantier continue.
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New Dehli veut raser et déplacer trois de ses musées
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