À l’occasion d’une récente exposition au Musée des antiquités de Berlin, les Tanagras de la collection du Königlichen Museen ont subi des analyses. La datation par thermoluminescence a montré que de nombreuses figurines de terre cuite n’étaient que des copies du XIXe siècle.
BERLIN - Vers 1870, lors de fouilles effectuées dans les nécropoles de Tanagra, une ancienne ville de Béotie, proche de Thèbes, on a découvert dans certaines tombes de gracieuses statuettes de jeunes femmes en terre cuite, de 15 à 30 centimètres de hauteur. Ces Tanagras datent du VIe au IVe siècle avant notre ère. En 1873, les grands musées européens – British Museum, Musée du Louvre et le Königlichen Museen de Berlin –, furent les premiers à s’en porter acquéreurs. Les Tanagras remportèrent aussitôt un grand succès, et les sculpteurs héritiers du style rococo s’en inspirèrent.
Durant la décennie suivante, la demande s’accrut, les fouilles furent moins fructueuses et le gouvernement grec intervint pour contrôler ce commerce d’antiquités. Des marchands firent alors fabriquer des copies d’une qualité si remarquable que, durant plusieurs années, les musées les achetèrent sans hésiter. L’imitation des originaux n’était pas très difficile, car les attitudes stylisées et la palette des coloris se répétaient souvent. Parfois même, la falsification se limitait à l’ajout de telle ou telle partie du corps qui manquait à l’original.
Un catalogue des collections de figurines de terre cuite du König-lichen Museen, établi en 1878, dénombrait déjà trente-neuf Tanagras. À la fin du siècle, on s’aperçut à Berlin que l’on avait acheté aussi des faux, si bien que le musée n’accepta plus que les pièces mises au jour lors de fouilles pratiquées devant des témoins qui en garantissaient la provenance. Nul, cependant, ne signala alors la présence de faux au sein de la collection déjà réunie. À l’occasion de l’exposition du Musée des Antiquités, la Stiftung Preussischer Kulturbesitz admet maintenant que, dans ses collections, on relève la présence de nombreuses copies de Tanagras.
Grâce à la datation par thermoluminescence, le laboratoire Rathgen de Berlin a précisé que quatre-vingts statuettes dataient de la fin du XIXe siècle. L’analyse des figurines originales donnait une fourchette de dates entre 325 et 250 av. J.-C. La terre cuite contient du quartz et du phosphate qui emmagasinent, au fil des ans, une radioactivité dont la présence permet de dater avec précision la composition des objets.
Les analyses ont révélé les techniques de vieillissement utilisées par les faussaires, mis en évidence les ajouts, et établi un répertoire des anomalies les plus courantes – attitudes ou proportions extravagantes –, et surtout des coloris utilisés au XIXe siècle, qui n’étaient pas en usage à l’époque hellénistique.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les Tanagras du Musée étaient des faux
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°7 du 1 octobre 1994, avec le titre suivant : Les Tanagras du Musée étaient des faux