Ouvert en 1972, le Musée des arts et traditions populaires n’a accueilli que 59 000 visiteurs en 1995, soit trois fois moins qu’il y a quinze ans. Afin d’inverser cette tendance, les personnels scientifiques de ce musée-laboratoire ont redéfini les missions culturelles et les fondements muséographiques établis il y a trente ans sous l’autorité de Georges-Henri Rivière, pour construire \"le musée d’un millénaire de civilisation en France\".
PARIS. "La crise des ATP" toucherait-elle à sa fin ? Afin de "remobiliser une communauté scientifique très marquée par dix ans de crise et d’indifférence des pouvoirs publics", un vaste projet de refonte de ce musée-laboratoire a été établi par les conservateurs du Musée national des arts et traditions populaires (MNATP) et les chercheurs du Centre d’ethnologie française (CEF), installés dans la tour qui surplombe le musée du bois de Boulogne. Contrairement aux rapports successifs commandés ces dernières années par la Direction des Musées de France, cette réflexion générale a été menée de l’intérieur et a associé l’ensemble des équipes scientifiques du MNATP/CEF. À la "recherche d’une meilleure adéquation du musée aux préoccupations du public", les rédacteurs du rapport écrivent non sans courage que la muséographie "suscite, sauf chez les spécialistes, une réaction unanime de rejet". Figées depuis 1972, la galerie culturelle du rez-de-chaussée et la galerie d’étude du premier sous-sol disparaîtront donc "en faveur d’une présentation réellement évolutive et représentative des collections, qui se sont considérablement enrichies au fil des ans", déclare Michel Colardelle, à la tête des ATP depuis un an.
Puits de lumière
Après avoir écarté l’abandon du bâtiment conçu par l’architecte Jean Dubuisson, "les trois niveaux du musée pourraient être largement transformés pour aboutir à une surface d’exposition comprise entre 9 000 et 10 000 m2, au lieu de 7 000 actuellement", explique le nouveau directeur, qui préconise le déménagement des réserves du second sous-sol. La lumière ferait enfin son entrée dans ce sombre sanctuaire de la culture populaire française, grâce à "l’aménagement de trémies entre les différents niveaux, au percement de vastes baies latérales au rez-de-chaussée, à la modification du toit-terrasse en vue de fournir un éclairage zénithal indirect…" Un travail muséographique de fond viendra prochainement affiner ce cadre général, articulé autour d’une idée simple : la relance de l’intérêt du public doit passer par la rotation ininterrompue des collections permanentes. En outre, "l’ethnologie des deux derniers siècles sera dépassée au profit d’un musée de synthèse qui témoignera véritablement des progrès de la recherche scientifique et de l’évolution des théories", promet Michel Colardelle. "Si Georges-Henri Rivière était encore en vie, il supprimerait comme nous cette présentation obsolète, en total décalage avec l’état actuel de nos connaissances, au profit d’un lieu qui fasse réellement comprendre l’évolution de notre société dans son interaction avec son environnement".
Trois fois moins cher
Les ATP de la seconde génération s’inscriront en quelque sorte dans le prolongement du Musée des antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye. Plus proche d’un musée d’anthropologie historique que d’un musée de société, le futur musée englobera l’ethnologie, l’archéologie, l’histoire, la sociologie… Soit une synthèse de la culture populaire depuis l’an Mil jusqu’à nos jours, non seulement sur l’ensemble du territoire français, mais aussi dans les Dom-Tom et les anciennes colonies. À l’avenir, l’homme sera abordé dans toutes ses dimensions sociales, notamment dans son milieu urbain, industriel et ouvrier, et non plus uniquement à travers le filtre de la société rurale. Une politique d’édition accrue, y compris de cédéroms, et un programme d’expositions temporaires "plus grand public" devraient achever de relancer la fréquentation. Il faut espérer que ces dernières s’inspireront davantage de l’exposition "La différence" (jusqu’au 30 mars) que de celle consacrée à Astérix (jusqu’au 14 avril)… En supposant que les travaux commencent en l’an 2000, le nouveau musée pourrait rouvrir à l’horizon 2002. Les coûts de transformation devraient être compris entre 80 et 100 millions de francs, hors acquisition et aménagement des nouvelles réserves. "Au total, un réaménagement trois fois plus économique qu’une création ex nihilo", assure Michel Colardelle.
Un colloque "Réinventer un musée : le MNAM/CEF" est organisé aux ATP les 25 et 26 mars, rens. 01 44 17 60 63. Le programme est accessible sur le serveur Internet du ministère de la Culture (www.culture.fr)
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Les ATP reviennent dans le circuit
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°34 du 1 mars 1997, avec le titre suivant : Les ATP reviennent dans le circuit