VENISE / ITALIE
L'immense Palais des Vieilles Procuraties, qui borde la mythique place Saint-Marc à Venise, surplombant d'élégantes colonnades, ouvrira vendredi ses portes au public pour la première fois en 500 ans d'histoire, au terme de colossaux travaux de rénovation.
Témoin silencieux des siècles traversés par la Sérénissime, cet ancien haut-lieu du pouvoir vénitien est prêt à livrer ses secrets au visiteur, invité à s'engouffrer dans une enfilade d'arcades entourées de poutres en bois et de murs de briques. Pour les trois premiers jours d'ouverture, la visite est réservée aux seuls Vénitiens, dont 3 000 ont répondu présents en 72 heures, avant de s'élargir à partir du 13 avril aux touristes du monde entier.
Maître d'œuvre de cette transformation d'une surface de 12 000 m2, l'architecte anglais de renommée internationale David Chipperfield a été chargé par l'assureur italien Generali, propriétaire du palazzo, d'insuffler une nouvelle vie à cet édifice iconique. « La place Saint-Marc figure parmi les plus célèbres du monde, mais aucun d'entre nous n'a jamais imaginé ce qui se cache derrière ces façades construites par plusieurs architectes sur une centaine d'années », a déclaré M. Chipperfield à l'AFP.
Érigées au XIIe siècle, les Procuratie Vecchie furent dévastées par un incendie en 1512. L'édifice vénéto-byzantin fut remplacé en 1538 par une structure à trois étages, dans le style classique de la Renaissance italienne.
Lion ailé
Jusqu'à la chute de la République de Venise en 1797, les procurateurs, hauts magistrats qui secondaient le Doge, chargés du Trésor de la ville mais aussi des Affaires sociales, y ont travaillé tout en y occupant des logements gratuitement.
Sous les combles de l'édifice s'étendent désormais les locaux spacieux de The Human Safety Net, une fondation lancée par Generali pour venir en aide aux personnes les plus vulnérables, dont des réfugiés, ainsi que des salles d'exposition et un auditorium. « Les procurateurs s'occupaient des veuves, orphelins et pauvres. Pour nous, c'est un bel hommage à l'histoire et à l'identité de ce bâtiment d'y avoir The Human Safety Net, qui œuvre pour l'inclusion sociale », a expliqué sa directrice Emma Ursich.
A la gauche de l'entrée principale, le lion ailé de Saint Marc, symbole de la cité mais aussi l'emblème de Generali, est incrusté dans le mur de marbre blanc. Une plaque commémore la naissance en 1831 à Trieste de l'assureur, qui a pris ses quartiers à Venise l'année suivante.
« L'édifice avait été malmené pendant une très longue période, des décorations ont été enlevées, des escaliers, ascenseurs et salles de bains rajoutés, de manière très désordonnée. Notre responsabilité était de lui rendre une certaine intégrité », commente M. Chipperfield. Le chantier aura duré trois ans, après une phase de conception de 24 mois visant à préserver autant que possible les structures existantes.
Au premier étage, où Generali a toujours quelques bureaux après avoir transféré en 1990 son siège italien dans les environs de Venise, à Mogliano Veneto, les fresques et peintures murales ont été entièrement restaurées pour leur redonner de l'éclat.
La demeure de Sissi
« Ce n'est un secret pour personne que travailler avec l'administration en Italie est assez compliqué », ironise David Chipperfield. Planter le moindre clou dans un édifice historique réclame d'innombrables autorisations.
Quant aux artisans, « vous pouvez vous retrouver avec les meilleurs du monde », car il y a une longue tradition en Italie, « ils restaurent des bâtiments depuis mille ans ». « Il était essentiel de collaborer avec les artisans et fournisseurs locaux, en utilisant des techniques et des matériaux qui font partie de la tradition vénitienne », explique Cristiano Billia, directeur associé de David Chipperfield Architects Milan.
Ainsi, pour les sols, murs ou plafonds, ont été utilisés le pastellone, un produit naturel à base de chaux, le terrazzo, composé d'un mélange de fragments de marbre coloré et de ciment, ou encore le marmorino, un enduit de finition à effet satiné.
Juste en face, de l'autre côté de la place, se dressent les Nouvelles Procuraties, dont la construction fut achevée en 1640 et qui hébergeaient au milieu du XIXe siècle d'illustres membres de la dynastie des Habsbourg comme l'impératrice Sissi, pendant le règne des Autrichiens sur Venise. Sa demeure donnait sur les très secrets Jardins Royaux longeant le Grand Canal, eux-mêmes rouverts au public en 2019 à l'issue de cinq ans de restauration.
Cet article a été publié par l'AFP le 8 avril 2022.
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Le palais des Vieilles Procuraties, joyau de Venise, retrouve sa splendeur
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