Le Musée Jean-Jacques Henner rouvre après deux ans de travaux, offrant un écrin polychrome aux œuvres présentées en plus grand nombre de l’artiste, dont l’atelier était situé à Pigalle
PARIS - De la couleur et de la lumière : la dernière phase des travaux du Musée Jean-Jacques -Henner redonne au bel hôtel particulier de la plaine Monceau le supplément d’âme qui lui manquait. Rouvert après une première tranche de travaux en 2009, le musée a fermé en 2014 pour deux ans, afin de restructurer les réserves et de recréer le jardin d’hiver sous verrière, pour un montant d’1,7 million d’euros.
L’hôtel particulier et atelier du peintre Guillaume Dubufe (1853-1909), devenu en 1923 le « Musée Jean-Jacques-Henner », a bénéficié d’une cure de jouvence. Sous l’impulsion de l’architecte Sylvie Jodar et du scénographe Hubert Le Gall, le rez-de-chaussée est métamorphosé, réintégrant dans le parcours de visite les 220 mètres carrés du jardin d’hiver, autrefois défiguré par des murs de refend. Une verrière trapézoïdale unifie l’espace et met littéralement en lumière un sol en mosaïque découvert lors de la première phase de travaux. S’ouvrant sur le jardin d’hiver, le Salon aux colonnes retrouve une polychromie sombre de bleus et de gris, sous le plafond néo-Renaissance restauré. « Le bâtiment témoigne de l’émulation artistique de l’époque, avec le jardin d’hiver et son décor éclectique », explique Marie-Cécile Forest, directrice de l’établissement. Quelques prêts du Mobilier national et des toiles de Jean-Jacques Henner y figurent. Au fond, une estrade accueille un piano. « Dans cet espace, des concerts, des lectures et des conférences vont avoir lieu : grâce à l’histoire du quartier, le répertoire de la plaine Monceau nous ouvre des multitudes de perspectives », souligne Cécile Cayol, chargée des publics.
Une maison-atelier fin XIXe reconstituée
Dans l’ancienne salle à manger, une table numérique présente un plan de la plaine Monceau dans la deuxième moitié du XIXe siècle. Durant la IIIe République, les artistes bourgeois accourent dans ce nouveau quartier, bataillant pour obtenir les meilleures parcelles. Sarah Bernhardt, Isadora Duncan, les Dumas père et fils, Edmond Rostand, Claude Debussy, Charles Gounod, y prennent résidence. Les peintres et sculpteurs académiques aussi : Henri Gervex, Auguste Bartholdi ou Puvis de Chavannes y ont leur maison-atelier. Sur la table, quarante-trois personnalités sont ainsi localisées sur la plaine Monceau à son âge d’or, de 1870 à 1910. Le rez-de-chaussée du Musée Henner devrait donc, grâce à une programmation culturelle transversale et des partenariats avec les conservatoires du 17e arrondissement, refléter l’esprit des salons artistiques de l’époque.
Une deuxième belle surprise attend le visiteur aux niveaux supérieurs, consacrés à Jean-Jacques Henner lui-même : le retour de la polychromie des espaces, commencé en 2009 et achevé aujourd’hui dans le patio, qui retrouve ses accents jaune et bleu. Mais surtout, le parcours muséographique a été considérablement enrichi, multipliant par deux le nombre d’œuvres présentées. Un étrange Saint Sébastien exempt de flèches surprend le visiteur lorsqu’il sort du Salon rouge. La Liseuse, déposée par le Musée d’Orsay, élimine l’anecdotique, dans une atmosphère mordorée et mystérieuse. Henner crée un style qui lui est propre. S’il a remporté le prix de Rome, qui lui a ouvert les portes de la commande publique et des Salons, le peintre n’est pas académique tout en se tenant loin des avant-gardes. Quelque peu inclassable, son processus de création est abordé dans la dernière salle du parcours, l’Atelier gris. L’accrochage serré présente esquisses, variations, toiles abouties et inachevées autour de ses obsessions, les nus féminins, les portraits, les corps. Le charme de cet espace « recréé » – l’atelier d’Henner se trouvait à Pigalle – est indéniable et rend justice à sa peinture.
Enfin, inaccessibles au visiteur, les derniers étages, autrefois dévolus à l’appartement du conservateur et à son atelier (les statuts initiaux du musée prévoyaient un directeur-artiste), sont devenus des réserves. Un petit atelier subsiste malgré tout, qui a été rénové au-dessus de la nouvelle verrière. Il accueillera chaque année un jeune artiste en résidence, en partenariat avec l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris.
43 avenue de Villiers, 75017 Paris, tél. 01 47 63 42 73
Ouvert tlj sauf mardi, 11h-18h, entrée 6 €
www.musee-henner.fr
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Le Musée Henner reprend des couleurs
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°459 du 10 juin 2016, avec le titre suivant : Le Musée Henner reprend des couleurs