PRAGUE / RÉPUBLIQUE TCHÈQUE
Un nouveau musée Mucha vient d’ouvrir à Prague alors qu’il en existe déjà un, sur fond de conflit autour de « L’Épopée slave ».

Prague. Un lieu consacré à l’artiste tchèque, maître de l’Art nouveau Alfons Mucha (1860-1939), situé à Prague dans le palais Savarin (voir ill.), vient d’ouvrir ses portes le 24 février 2025 avec un retard d’un mois sur la date initiale. Mais les espaces prévus pour l’exposition de « L’Épopée slave » ne devraient ouvrir... qu’en 2028. Cette longue attente s’explique par une suite de litiges autour de cette œuvre majeure de l’artiste tchèque et un conflit avec un autre musée Mucha.
Pendant dix-sept ans, Alfons Mucha a œuvré à la réalisation de L’Épopée slave (1912-1928), un ensemble de 20 panneaux de grand format, pour en faire don à Prague à condition qu’un lieu d’exposition approprié soit construit dans la ville. Mais le temps a passé et les tableaux n’ont toujours pas de lieu qui leur soit dédié. Le petit-fils de l’artiste et initiateur de la Fondation Mucha, John Mucha, entame alors une procédure judiciaire en 2016 contre la ville de Prague afin d’obtenir la propriété de L’Épopée slave.
Le litige perdure jusqu’en 2021, date à laquelle le groupe Crestyl propose de créer un espace d’exposition à Prague pour accueillir les 20 panneaux, et de prendre en charge les frais d’aménagement. Une proposition acceptée par John Mucha et la ville de Prague. John Mucha retire alors son action en justice. La proposition de Crestyl s’inscrivait dans le contexte du « Savarin Project », un projet immobilier à 400 millions d’euros dans le centre historique de Prague. Ce projet inclut la restauration du palais baroque Savarin par l’architecte Thomas Heatherwick, afin d’y installer une partie de la collection d’une branche de la famille Mucha sur une surface de 1 100 m². Les objets exposés narreraient l’histoire de la création de L’Épopée slave à travers des études, des affiches, des photographies, des objets et des peintures. Au sous-sol du projet Savarin, de grands espaces sont donc prévus pour l’exposition de L’Épopée slave.

Le nouveau musée se présente comme « le seul musée officiel consacré à l’artiste tchèque ». Problème, il existe déjà à Prague depuis plus de vingt-cinq ans un musée consacré à l’artiste, situé rue Panská, non loin du palais Savarin. En 2024, la Fondation Mucha rompt son contrat avec le musée de la rue Panská et lui interdit d’utiliser le nom Mucha. Cependant, le petit musée, riche d’une collection constituée par le joueur de tennis d’origine tchécoslovaque Ivan Lendl avec l’aide de Jiri Mucha (fils de l’artiste), qui s’étend sur une surface de 500 m2, n’entend pas fermer pour autant. « Nous sommes aujourd’hui en procès avec le Mucha Trust à l’initiative du nouveau musée », a expliqué au Journal des Arts, son directeur Sebastian Pawlowski.
Et pour compliquer la situation, voici qu’une autre branche de la famille, la petite-fille d’Alfons Mucha, Jamila Mucha Plocková, qui coopère avec le premier musée Mucha a intenté une action en justice, car elle n’est pas d’accord avec l’emplacement prévu de L’Épopée slave dans les espaces souterrains du palais Savarin. Elle souhaite que, pour cet ensemble d’œuvres, un bâtiment à part soit construit.
Le tribunal se réunira à nouveau le 27 mai prochain pour statuer sur cet imbroglio. En attendant, le cycle de L’Épopée est exposé au château de Moravský Krumlov (voir ill.) en Moravie du Sud, depuis 2021. Le maire adjoint de Prague Jirí Pospíšil a déclaré qu’il envisageait de prolonger le prêt au château de cinq ans.
La Fondation Mucha avait caressé l’idée, il y a une dizaine d’années, de créer un musée Mucha à Paris en écho aux années parisiennes de l’artiste qui occupa un atelier dans le 5e arrondissement, de 1896 à 1904, mais le projet n’avait pas abouti. Par ailleurs les Français avaient pu découvrir les 20 panneaux de L’Épopée slave, en version numérique au Grand Palais immersif en 2023.
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Imbroglio autour des deux musées Mucha à Prague
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°650 du 28 février 2025, avec le titre suivant : Imbroglio autour des deux musées Mucha à Prague