Le conseil d’administration du Whitney Museum of American Art a confié à l’architecte italien son projet d’extension à Manhattan.
NEW YORK - Le 15 juin, le conseil d’administration du Whitney Museum of American Art, à New York, a décidé de confier à l’architecte Renzo Piano l’extension du bâtiment historique du musée sur Madison Avenue. Les modalités de ce projet ne seront pas connues avant la fin de l’année, mais il sera demandé à l’architecte d’imaginer un espace supplémentaire de 6 500 mètres carrés propre à accueillir les collections permanentes, les expositions temporaires, un auditorium, des infrastructures d’accueil pour les visiteurs et des bureaux administratifs.
Le directeur du musée, Adam D. Weinberg, a annoncé qu’une étude serait menée au cours des prochains mois. Celle-ci portera sur la délocalisation d’une partie du musée afin de libérer de l’espace pour les œuvres d’art. La solution la plus vraisemblable consisterait en la création d’ une annexe au moins à Manhattan pour les expositions et le « programme d’études indépendantes », ainsi que le regroupement des réserves aujourd’hui réparties entre plusieurs entrepôts. L’annexe pourrait aussi abriter un centre d’études et un laboratoire de conservation.
Ces vingt dernières années, le Whitney Museum a échoué à plusieurs reprises dans ses efforts d’agrandir l’édifice de granit conçu par Marcel Breuer en 1966. Dans les années 1980, les riverains ont fait avorter un projet d’extension postmoderne de taille impressionnante imaginé par Michael Graves et, l’an dernier, le conseil d’administration a lui-même rejeté le projet, plus important encore, de Rem Koolhaas, dont le coût excédait largement toutes velléités de levée de fonds.
Entre-temps, l’architecte Richard Gluckman a réussi à convertir le quatrième étage en galeries d’exposition après avoir déménagé les bureaux administratifs et la bibliothèque dans d’anciens bâtiments adjacents appartenant à l’institution. Mais avec seulement deux centièmes de la collection permanente exposés et aucun centre approprié pour l’étude des œuvres sur papier – soit les deux tiers de la collection –, le musée s’est vu contraint de reprendre le projet à zéro.
En janvier, les membres du conseil d’administration ont engagé le conseiller en architecture Reed Kroloff, devenu doyen de l’École d’architecture de l’université de Tulane (La Nouvelle-Orléans), pour les aider à préparer une liste d’environ 50 architectes. Un comité de sélection présidé par l’un des membres du conseil, Melva Bucksbaum, a retenu une douzaine de candidats et les a auditionnés entre les mois de mars et avril – citons Herzog & de Meuron, David Chipperfield, Todd Williams, Billie Tsien & Associates, Richard Gluckman, sans oublier plusieurs jeunes cabinets d’architecture. Mais le conseil a fini par jeter son dévolu sur le gagnant du Pritzker Prize, Renzo Piano.
L’extension sera développée sur le côté sud de l’édifice de Breuer et comprendra cinq bâtiments du XIXe siècle et deux hôtels particuliers de la 74e Rue, tous adjacents au musée et sa propriété. Si quatre de ces bâtiments XIXe, classés, doivent être préservés, Renzo Piano a indiqué que celui directement accolé à l’édifice de Breuer serait détruit pour faire place à un hall d’entrée central. Les autres immeubles feront vraisemblablement office de réserves au rez-de-chaussée, de bureaux de conservation à l’étage et offriront même un restaurant panoramique surplombant Madison Avenue. Derrière ces immeubles, le nouvel édifice de Piano abritera de grandes galeries d’exposition, dotées de lumière naturelle, qui seront réservées soit à la collection d’après guerre soit aux expositions temporaires. Cette extension sera reliée à tous les étages au bâtiment de Breuer, permettant au visiteur de bénéficier d’une expérience architecturale totale. Au moins l’un des deux hôtels particuliers délabrés sur la 74e Rue sera démoli afin d’obtenir un maximum d’espace supplémentaire : « J’aimerais pouvoir intégrer un petit jardin dans le coin est du site, de manière à ce que l’on aperçoive de la lumière dès l’entrée du nouveau bâtiment sur Madison Avenue. Cela donnera plus de profondeur et de transparence », explique l’architecte.
Sensible à l’opposition des riverains et de la Commission des monuments classés lors des premiers projets d’extension, Adam D. Weinberg souhaite créer un édifice qui « s’intègre confortablement au sein du quartier et s’accorde au style de l’ensemble des bâtiments autour du musée ». La nouvelle construction respectera la personnalité de celle de Breuer et préservera les façades des immeubles XIXe. Renzo Piano projette d’ailleurs d’installer l’auditorium et les autres infrastructures en sous-sol de manière à réduire le volume et la hauteur de l’extension. Adam D. Weinberg a annoncé qu’une campagne de levée de fonds serait lancée en faveur des bâtiments, des structures hors site, des réserves et du budget de fonctionnement. Leonard Lauder, l’un des membres du conseil et accessoirement le dirigeant milliardaire de la société de cosmétique Estée Lauder, devrait en tenir le rôle principal.
Basé à Gênes et à Paris, Renzo Piano est incontestablement l’architecte favori des musées américains. Il doit notamment sa célébrité au Centre Pompidou à Paris (créé en duo avec Richard Rogers dans les années 1970), à la Menil Collection à Houston (1982-1986), et à la Fondation Beyeler à Riehen, près de Bâle, en Suisse (1997). Il a récemment achevé le Nasher Sculpture Center à Dallas (Texas) et s’attelle actuellement aux extensions respectives de l’Art Institute de Chicago, du High Museum d’Atlanta (Géorgie), des Harvard University Art Museums et du Los Angeles County Museum. À Manhattan, il est responsable de l’agrandissement de la Pierpont Morgan Library, de la construction des nouveaux locaux du quotidien The New York Times et de la conception d’un projet d’ensemble pour le campus de la Columbia University à Harlem.
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Au Whitney, Piano fortissimo
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°197 du 8 juillet 2004, avec le titre suivant : Au Whitney, Piano fortissimo