Comme le déclarait Paul Valéry : « L’existence de la photographie nous engagerait plutôt à cesser de vouloir décrire ce qui peut, de soi-même, s’inscrire ; et il faut bien reconnaître qu’en fait, le développement de ce procédé et de ses fonctions a pour conséquence une sorte d’éviction progressive de la parole par l’image. »
Et pour peu que la langue soit complexe, le recours à l’image est une nécessité. Si François Brunet, dans La Naissance de l’idée de photographie (PUF, 361 pages, 29 €), tente de clarifier les différents procédés photographiques, le DVD édité par le Musée Nicéphore-Niépçe, Sensible à la lumière (éditions du Cinéphore), est mille fois plus éclairant. Il serait injuste de réduire l’ouvrage à sa difficulté à être accessible tout en étant fidèle à la complexité scientifique, technique et philosophique de la photographie. Rares sont les livres qui embrassent comme celui-ci tous les champs explorés par cet art avec pour but de permettre au lecteur d’envisager la photo autrement que comme une simple image. Comme l’évoquait Oliver W. Holmes, avec l’avènement de la photo : « La forme est désormais divorcée de la substance. » Ce qui renvoie à l’idée de Michel Nuridsany que « l’essentiel est dans la décision, la pression du doigt qui fait passer la vision de l’indicible au formulé, de l’intime au public ». On en arrive ainsi à la réflexion que Stieglitz met en forme avec sa série sur les nuages qui « met l’accent sur le geste qui le détermine et la pensée qui l’anime ».
Si l’ouvrage développe parfois de manière absconse la naissance de l’Idée de photographie, il passionne par l’étude du succès du daguerréotype aux États-Unis ainsi que par l’analyse de l’avènement de Kodak avec sa portée sociologique. Kodak a donc révolutionné le marché de la photo en la démocratisant, Bernard Plossu, lui, a révolutionné la pratique de la photo en abolissant l’idée de savoir-faire. Mais, quarante ans après le Voyage mexicain (L’intégrale, 1965-1966. Le Retour à Mexico 1970, Images en manœuvres Éditions, Musée des beaux-arts et d’archéologie de Besançon, 30 et 14 €), ses photos semblent se taire, comme si l’âge en avait asséché le contenu pour n’en faire que des témoignages d’un temps révolu. Leur intérêt semble s’être arrêté à la personnalité du photographe et à son idée de la photographie. En comparaison avec Strand et Cartier-Bresson, qui ont abordé la même thématique,
les émotions véhiculées sont bien faibles. De plus, le montage du catalogue est attendu, trop intellectualisé, en contradiction complète avec la liberté du photographe d’alors.
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Une image vaut-elle mieux que les mots ?
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°645 du 1 avril 2012, avec le titre suivant : Une image vaut-elle mieux que les mots ?