À l’image de son intitulé offensif, l’ouvrage de Dominique Baqué maintient avec sang froid un solide équilibre entre pamphlet vigoureux et thèse patiemment argumentée. Du moins dans une large première partie. Enracinant son propos dans un long (et nécessaire) prologue en forme de bilan, l’auteure rappelle les liens de soumission entretenus longtemps entre artistes et idéologies, les premiers n’ayant finalement qu’été dominés parles secondes. L’effondrement de ces idéologies, l’affaissement du politique en général, et les crises qui suivirent dès les années 1980 jetèrent les artistes dans un rapport plus diffus, épars et sans doute individuel à la réalité sociale et politique. Convoquant la dimension politique de l’œuvre comme seul critère d’appréciation, Dominique Baqué entreprend alors un travail d’analyse très critique consacré aux productions des années 1980 et 1990 susceptibles de revêtir une vocation politique ou sociale et dont elle juge âprement l’efficience. Pour ce faire, elle passe au crible quelques figures et œuvres symptomatiques des deux décennies considérées, soulignant et argumentant leur échec en terme d’impact politique : Jenny Holzer, Barbara Kruger, Krzysztof Wodiczko ou encore l’Anglaise Lucy Orta pour les néo-avant-gardes, Rirkrit Tiravanija, Pierre Joseph ou Felix Gonzalez-Torres et quelques autres pour l’esthétique relationnelle que l’auteure qualifie d’art officiel de la dernière décennie. Sans pour autant fustiger leurs représentants, Dominique Baqué explique son embarras devant une pratique qui s’abrite selon elle sous le principe de « convivialité » ou d’« écoute sociale », et ne propose finalement que « …des sensations dérisoires, des échanges inchoatifs, des fêtes factices – quelque chose comme un bavardage mondain… », bien loin de la réalité sociale. Une pratique destinée et faite par un groupe socioculturel très marqué. L’auteure amène finalement dans un second temps l’objet discutable de sa thèse, affirmant la nécessaire transformation de l’art contemporain vers d’autres formes d’art, celles du documentaire en particulier. Interprétation kantienne de l’œuvre d’art déjà avancée dans le préambule à l’ouvrage et réintégrée ici dans la forme jugée lucide et ultime du documentaire.
Dominique Baqué, Pour un nouvel art politique : de l’art contemporain au documentaire, Flammarion, 2004, 21,5 euros.
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Pour un nouvel art politique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°557 du 1 avril 2004, avec le titre suivant : Pour un nouvel art politique