« C’est l’éternel été, c’est l’archipel où dorment des îles inconnues, c’est l’immensité de saphir sous les cieux clairs […].
Le ciel est en feu, la terre en sang »… Ces mots éclatant de bleu, de rouge, d’absolu, sont ceux de Nicolas de Staël : âgé de 14 ans, celui qui n’est pas encore peintre évoque ainsi Virgile dans le journal de son collège. Pour nous, aujourd’hui, ils semblent décrire ce que seront, un jour, ses tableaux. On y trouve, observe Stéphane Lambert, « l’attrait de l’inexploré. L’aspiration à la lumière, la conscience de la guerre. La tension entre les forces opposées. Le bleu, le feu, le sang. L’alerte rouge. Ce rouge que l’on retrouvera triomphant, impérial, dévastateur, dans l’ultime toile de Staël, le fameux Concert». Au long de son magnifique ouvrage sur le peintre, cet essayiste au regard d’aigle raconte le cheminement artistique de Nicolas de Staël, auquel le Musée d’art moderne de Paris consacre actuellement une grande rétrospective. Richement illustré de toiles célèbres comme méconnues, de photographies et de documents d’archives inédits, ce très beau livre invite à redécouvrir la vie de ce peintre exilé, qui commença en 1914 sous les ciels gris-bleu de Saint-Pétersbourg pour s’achever à Antibes, où Staël se donna la mort en 1955, à l’âge de 41 ans. Aussi lumineuse que tragique, cette vie fut entièrement vouée à la réalisation d’une œuvre sans cesse réinventée. « On fonctionne comme on peut. Et moi j’ai besoin pour me renouveler, pour me développer, de fonctionner toujours différemment d’une chose à l’autre, sans esthétique a priori… Ce qui importe, c’est que ce soit juste », confiait le peintre. Si on sent battre dans ces pages le cœur de Nicolas de Staël, cet ouvrage palpitant n’a pas pour fin de se lire comme un roman. La fureur de vivre de cet éternel voyageur, au physique de beau ténébreux à la taille de géant et à l’allure aristocratique, est racontée avec précision, justesse et pudeur, pour éclairer l’œuvre qu’elle nourrit. Cette dernière se donne ainsi à voir et comprendre, dans ses (r)évolutions, ses quêtes, ses douleurs, ses extases, la foudroyante beauté de ses archipels inconnus, de ses cieux clairs, de sa terre en sang.
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Nicolas de Staël, la fureur de vivre
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°768 du 1 octobre 2023, avec le titre suivant : Nicolas de Staël, la fureur de vivre