Mythologies personnelles

Regard sur soi ou manière d’interroger l’autre, simple exhibitionnisme ou quête d’une identité, l’autoportrait pose, de tout temps, une multitude de questions. Mythologies personnelles propose douze portraits d’artistes – Christian Boltanski, Orlan, Nan Goldin, Gilbert & George, Annette Messager, Sarkis, Sophie Calle, Jean Le Gac, Matthew Barney, Cindy Sherman… –, qui montrent autant de manière d’appréhender l’intime dans la création contemporaine. Clair, documenté – de nombreux renvois à d’autres artistes, des notices biographiques, un lexique –, ce petit livre est une bonne introduction à un vaste et passionnant sujet. Chez Nan Goldin, dont il est question dès le premier chapitre, l’œuvre prend des allures de journal intime, de témoignage contre l’oubli. Celle que l’on peut considérer comme l’une des figures de proue de cette tendance à exhiber la vie ordinaire dans l’art contemporain photographie ses proches dans leur nudité, sans distance mais sans complaisance, avec humanité. D’autres utilisent leur propre image dans une expression plus narcissique, c’est notamment le cas de Gilbert & George ou d’Éva et Adèle, qui, en perpétuelle représentation, construisent leur travail sur les duos qu’ils forment et semblent dire au public, pour reprendre la formule de Ben, « regardez-moi, cela suffit ». Jean Le Gac et Matthew Barney, chacun à leur manière, plongent dans un univers fictionnel, tandis que Sophie Calle interroge sa propre identité dans un travail plus intellectuel faisant appel à la mémoire, aux mots autant qu’à l’image. Enfin, le dernier chapitre du livre, consacré à Cindy Sherman, Orlan et Gina Pane, se penche sur le cas de personnalités dont le « moi » – par le biais du corps et des transformations qu’il subit – devient objet.