Spécialiste du Paris du XVIIe siècle à qui il a consacré une thèse sur l’habitation, Nicolas Courtin, historien de l’art et enseignant à l’École du Louvre, s’est tourné pour son troisième ouvrage vers l’architecture parisienne du XVIIIe siècle soumis à son expertise depuis 2009 à la Commission du Vieux Paris.
Très documenté, le livre, paru chez Parigramme, synthétise les recherches précédentes et réactive les matériaux d’époque : cartes, gravures, dessins, peintures et surtout témoignages de nombreux auteurs du siècle des Lumières qui ont participé à immortaliser la capitale française, tels Voltaire et surtout Louis-Sébastien-Mercier, dont les observations emphatiques et sévères de la société de Louis XVI – principalement extraites de son Tableau de Paris composé entre 1781 et 1788 – s’insèrent sans cesse dans les lignes de Courtin. Ce dernier signe un ouvrage vivant et clair qui a le mérite de situer la ville dans son siècle avant de traiter du style architectural. Entre le dernier quart de règne du Roi-Soleil et la Révolution, Paris est alors la seconde ville après Londres la plus peuplée d’Europe. En pleine expansion, elle entreprend son assainissement et trace ses principaux axes de croissance qui subsistent encore aujourd’hui : rive droite, Louis XIV a converti les enceintes fortifiées de Charles V et Louis XIII en grands boulevards composés d’une chaussée centrale pour les voitures et de larges contre-allées pour les promeneurs. Tout au long du XVIIIe siècle (seconde moitié pour la rive gauche), ces voies d’intense socialisation se parent d’hôtels, de cafés, de commerces.
Parallèlement, la disparition des murs d’enceinte signe l’intégration progressive des faubourgs dans la ville. Ces lieux d’arrivée d’immigration populaire avalent les vignes et prairies qui ont peuplé les rêveries du promeneur solitaire qu’était Rousseau et tandis que l’administration s’emploie à limiter leur densification, se rapprochent des villages de Ménilmontant, Charonne, Montmartre… Une nouvelle couronne se dessine : permettant la perception de l’octroi, le mur des Fermiers généraux est percé de 55 bureaux à la grecque dont il ne reste plus que quatre exemples dans le paysage parisien, telle l’imposante rotonde faisant face au bassin de la Villette. Démoli en 1860 par Haussmann, ce mur détesté des parisiens dessinera le tracé des boulevards extérieurs dans des villages définitivement annexés à la ville.
L’auteur offre ainsi un déroulé précis à la compréhension architecturale de Paris. Colonne par colonne, linteau par linteau, les fantaisies rocailles et les dignités néoclassiques, rompant avec le Grand Siècle ou régénérant ses constructions, sont décortiquées dans la seconde moitié de l’ouvrage. De ce livre aux illustrations précisément légendées et parcouru de superbes photographies des édifices conservés, on ne regrettera que l’absence des numéros des visuels pour faciliter la lecture et peut-être d’une carte de Paris plus actuelle localisant pour le promeneur les traces du XVIIIe siècle.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Les rues de Paris au siècle des Lumières
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €octobre 2013, ed Parigramme, 189 pages, 45 €.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°402 du 29 novembre 2013, avec le titre suivant : Les rues de Paris au siècle des Lumières