Nous sommes en juin 2012. Leonardo Cremonini n’est plus de ce monde depuis deux ans. Derrière lui restent ses peintures, ainsi que son atelier sur le point d’être vidé, où il aura créé et accumulé des objets durant soixante années. Tout un lieu donc, habité des traces de celui qui quitte l’Italie pour Paris en 1951.
Niché sous les toits, dans un espace exigu, rue de Buci (à Paris), l’atelier se trouve au-dessus de l’appartement familial. Toutefois, aucune communication n’est établie entre le lieu de vie et ce jardin secret, fréquenté par très peu de monde. Le bail touchant à sa fin, Pietro, architecte et fils de Leonardo, y reçoit quelques proches de son père. Sont présents : Gilbert Lascault, critique d’art et coauteur d’un livre sur Cremonini ; Germain Viatte, conservateur général du patrimoine français ; Ramuntcho Matta, dont le père était peintre et ami depuis l’Italie avec Cremonini ; et Anna-Maria Tsakali, une de ses anciennes élèves de l’École nationale des Beaux-arts de Paris, aujourd’hui peintre à son tour. Surgit aussi la voix de l’intéressé, extraite d’entretiens avec Marc Le Bot et Bertrand Jérôme, alors que les voix de Gilbert Lascault et Germain Viatte sont difficiles à attribuer.
Dans l’intimité de la création du peintre
Dans ce véritable cabinet de curiosités, des crânes d’animaux côtoient une mâchoire d’hippopotame, des cailloux, bois gravés, et objets composites. Ou encore cette molaire, grande comme une main, nervurée comme un paysage qui, retournée, peut devenir volcan. Issus pour la plupart de la nature, chacun de ces objets a nourri le regard de Cremonini, sans jamais être reproduit, sa volonté étant de peindre le rapport entre les choses et non l’objet lui-même. Aussi, ici, l’atelier sert donc de point de départ – et non de finalité – pour comprendre son approche et ce qui nourrit ses toiles, en tissant des liens entre les éléments soulevés, comme il le faisait dans son travail. Au milieu de ces objets, des tableaux inachevés sont restés. L’occasion pour Pietro de souligner l’habitude qu’avait son père d’en peindre plusieurs à la fois, sans en connaître à l’avance le sujet et le moment de la touche finale. Il commençait par des tâches de couleur donnant lieu à des formes qui structuraient l’espace d’une manière quasi accidentelle, le dépassant lui-même. Du chaos, dans un processus lent, naissait alors la composition avec des objets figuratifs. Dès lors, l’imaginaire de l’auditeur recompose les toiles à la lumière des explications fournies, en allant de l’abstrait vers le concret. Loin de l’inventaire de l’atelier à proprement parler, la croisée de ces regards offre une restitution de ce que fut l’homme, son processus de création, et sa philosophie centrée sur le sensible, dont attestent avoir hérité ses élèves. « Ma peinture me permet de connaître ce que je vis. C’est le seul moyen que j’ai pour être », confessait-il.
L’Atelier de Leonardo Cremonini par Marie du Bouchet Réalisation : Gaël Gillon sur France Culture le jeudi 9 mai 2013 de 23h à minuit. Et en podcast pendant un an sur www.franceculture.fr/emission-l-atelier-de-la-creation
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À l’écoute de Cremonini
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°392 du 24 mai 2013, avec le titre suivant : À l’écoute de Cremonini