Dès le milieu du XIXe siècle, une vague de japonisme a submergé l’Europe. Francesco Morena détaille ce que nous lui devons, des chefs-d’œuvre de Van Gogh à l’esthétique manga.
Enseignant d’archéologie et d’histoire de l’art japonais à l’université de Naples – L’Orientale, Francesco Morena a publié des ouvrages remarqués sur l’estampe japonaise. Dans Les Impressionnistes et le Japon, il analyse le japonisme, cet engouement que les artistes occidentaux ont éprouvé au XIXe siècle pour l’art japonais, puis étend son propos à l’art du XXe siècle et à l’influence de la pop culture japonaise sur l’art contemporain.
Après avoir raconté l’ouverture du Japon sur le monde à l’ère Meiji (1868-1912), il montre que l’Europe était prête à recevoir son influence artistique dès l’Exposition universelle de Londres en 1862. À Paris, Madame Desoye ouvrait la même année La Jonque chinoise, « une boutique d’antiquités qui devint rapidement la référence dans le domaine de l’art d’Asie orientale ». Puis, l’Exposition universelle de 1867, à Paris, devait marquer le « début d’un engouement européen pour tout ce qui avait trait au pays du Soleil-Levant ».
C’est alors « La révolution du trait et de la couleur », selon le titre du chapitre suivant : à vie nouvelle, il fallait un art nouveau.« Les codes du langage artistique qui avaient dépeint l’Ancien Régime se prêtaient-ils encore à la représentation de puissantes bouffées de vapeur d’un train en marche ? », questionne l’auteur, rappelant que le XIXe siècle était préparé à recevoir ces influences orientales par son goût de l’éclectisme. Très illustré, le livre met en parallèle œuvres japonaises et occidentales. À l’estampe Dans lesalon privé d’une maison de thé ouvrant sur la baie de Shinagawa (vers 1783) de Torii Kiyonaga répond ainsi la peinture Variation de couleur chair et vert, le balcon (vers 1864-1870) de James Abbott McNeill Whistler. La Promenade, dite aussi La Femme à l’ombrelle (1875) de Claude Monet semble une variation de Femme avec ombrelle dans levent (1767-1768) de Suzuki Harunobu et Les Meules (1891) du maître français s’harmonisent avec Le Fuji rouge dans une embellie (1830-1831) de Katsushika Hokusai. L’auteur montre aussi comment Edgar Degas puise dans l’estampe japonaise son répertoire de danseuses et de femmes se peignant ou faisant leur toilette.
Dans la partie « Le Japon, un état d’esprit », le japonisme est décliné de Van Gogh à Picasso. On connaît la passion que le premier vouait à un art qui lui avait donné ses motifs, ses couleurs et son intérêt pour la nature. L’art de Gauguin, de Toulouse-Lautrec, d’Odilon Redon ou encore de Gustav Klimt est analysé dans la même perspective. William Merritt Chase importe ce goût aux États-Unis tandis qu’il inspire ses illustrations à l’Anglais Aubrey Beardsley. À Munich, Kandinsky et Franz Marc y succombent à leur tour tandis qu’en 1901 Picasso dessine à la japonaise la danseuse Sada Yacco. Plus tard, ce sont les estampes érotiques (shunga) qu’il transposera.
La suite est consacrée à la dette des arts décoratifs européens du XIXe et du début du XXe siècle envers le Japon. Plus méconnue est celle de l’art abstrait qui emprunte à la philosophie zen. Aujourd’hui, le pays du Soleil-Levant impose son esthétique dans les arts graphiques comme dans la mode ou le cinéma.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
La révolution japonaise dans l’art occidental
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°625 du 19 janvier 2024, avec le titre suivant : La révolution japonaise dans l’art occidental