Rarement la sortie d’un ouvrage sur l’art abstrait aura autant suscité la curiosité. Il faut dire que l’objet lui-même est intrigant au-delà du choix du sujet, inspiré d’un catalogue d’exposition de 1963, dirigé par Ben Heller pour le Musée juif de New York. Feuilleter ces trois volumes fait penser à une pièce très drôle du collectif bordelais Présence Panchounette où un haltère voyait ses poids substitués par des ouvrages classiques de l’histoire de l’art (Gombrich entre autres) et ainsi s’appeler « Le poids de la culture ». Ici avec ses treize kilos répartis sur 2 110 pages écrites durant seize ans d’intensives recherches, l’ouvrage de Claudine Humblet déclenche l’admiration autant que l’étonnement, renvoie aux volumineuses et interminables thèses d’état. Comment aujourd’hui, alors qu’on souligne le coût exorbitant qu’atteignent les droits de reproduction (voir le dossier de L’Œil n° 550), les éditeurs de Claudine Humblet ont-ils trouvé le budget pour rassembler autant d’images ? Car c’est là le point fort de cet ouvrage, la qualité et la richesse de l’iconographie qui fait de la Nouvelle Abstraction une référence, plus que pour sa valeur rédactionnelle, très classique et parfois même décevante sur certains exemples comme Stella. Les textes décrivent la progression stylistique d’une bonne quarantaine d’artistes, connus comme Rothko, Newman, Reinhardt, Kelly, Noland, Agnes Martin, Olitski, ou moins médiatiques mais tout aussi respectés sur le marché de l’art comme Paul Brach, Larry Bell, Robert Mangold, Robert Ryman, John McCraken, Robert Irwin, Mark di Suvero et Robert Grosvenor. Sans se focaliser uniquement sur la peinture abstraite, ce qui est une très bonne idée, Claudine Humblet a construit un ouvrage solide mais par trop descriptif à la lecture fastidieuse quoique bien relayé par une iconographie et des bibliographies impeccables. Sans aucun doute cette nouvelle bible trouvera une place de choix dans les rayonnages des bibliothèques universitaires mais devrait aussi séduire des particuliers pour la fierté d’investir dans un objet aussi incongru.
Claudine Humblet, La Nouvelle Abstraction américaine, 1950-1970 (coffret en trois volumes), Skira-Seuil, 2003, 320 euros.
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La Nouvelle Abstraction américaine
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°554 du 1 janvier 2004, avec le titre suivant : La Nouvelle Abstraction américaine