NEW YORK - La Grèce n’est pas Lehman Brothers. Tel est le premier enseignement que l’on peut tirer des grandes ventes en mai à New York. En novembre 2008, après la faillite de la désormais célèbre banque américaine, les ventes du soir d’art contemporain de Christie’s et Sotheby’s avaient chuté à 239 millions de dollars avant de plonger à nouveau en mai 2009 à 141 millions de dollars.
Depuis, le système bancaire américain a repris des forces. Mais alors qu’un pays tout entier, la Grèce, s’enfonce dans la crise, le marché de l’art contemporain n’en a cure et vole de records en records : 422 millions de dollars (tous les montants indiqués sont frais compris) en mai 2010, 558 en mai 2011 et maintenant 655 millions de dollars en mai 2012. C’est même une performance – de peu par rapport à 2007 – pour Christie’s New York qui n’avait jamais autant vendu d’art contemporain en une seule session : 388 millions de dollars. Tout autant que le produit total des ventes, c’est l’envolée des prix qui frappent les esprits. L’adjudication faramineuse à 120 millions de dollars pour Le Cri de Munch, dans les ventes d’art moderne, semble avoir stimulé les ardeurs des collectionneurs. Un magnifique Rothko de 1961 est parti chez Christie’s à 87 millions de dollars, enlevant au Triptych de Francis Bacon (adjugé 86 millions de dollars par Sotheby’s en 2008), le titre symbolique d’œuvre d’art contemporain la plus chère vendue aux enchères. Un Roy Lichtenstein de 1964 (Sleeping girl) a trouvé preneur chez Sotheby’s à 44,9 millions de dollars, constituant un nouveau palier pour l’artiste pop art. Le très médiatisé FC 1 d’Yves Klein (Christie’s) a été adjugé au milieu de son estimation à 36,4 millions de dollars. Au total sur les 102 lots vendus, 16 ont dépassé les 10 millions de dollars. Pour Michael Gumener, le spécialiste art contemporain de Christie’s Paris : « tout autant que le volume global, le faible taux d’invendu souligne la profondeur du marché ». Et de fait, le taux d’invendu par lot est particulièrement faible pour Christie’s (5 %), faisant nettement mieux que Sotheby’s (19 % et deux lots retirés de la vente). Tout aussi optimiste, Grégoire Billault, spécialiste senior international chez Sotheby’s, souligne la maturité du marché « capable d’étalonner très précisément » la valeur des lots. Une maturité qui repose sur un nombre solide et croissant d’acheteurs du monde entier. « Il y avait encore trois enchérisseurs à 30 millions de dollars » pour le tableau de Francis Bacon (Figure Writing Reflected in a Mirror, 1976), finalement vendu 44,9 millions de dollars, précise-t-il. Malgré la globalisation du marché, on constate une certaine spécialisation géographique. Les artistes chinois, encore nombreux les années précédentes à Londres et New York, ont quasiment disparu, préférant être à l’encan à Hongkong. De même, en dépit des très bons résultats obtenus par Francis Bacon, Yves Klein, Gerhard Richter (ou des artistes européens), New York ne cache pas son tropisme pour les expressionnistes abstraits ou le pop art américain.
Ainsi, en moins de dix jours, si l’on ajoute les ventes d’art impressionniste et moderne et les ventes du jour d’art contemporain des deux maisons de vente, ainsi que les honorables résultats de Phillips de Pury (87 millions de dollars), ce sont plus d’1,25 milliard de dollars de marchandises qui ont changé de main.
Christie’s, le 8 mai
- Estimation : 240 à 330 millions de dollars, hors frais
- Résultat : 388 millions de dollars (299 millions d’euros), frais compris
- Nombre de lots vendus/invendus : 56/3 (95 %)
Sotheby’s, le 9 mai
- Estimation : 216 à 304 millions de dollars, hors frais
- Résultat : 266 millions de dollars (209 millions d’euros), frais compris
- Nombre de lots vendus/invendus : 46/11 (81 %)
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New York voit la vie en orange
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°370 du 25 mai 2012, avec le titre suivant : New York voit la vie en orange