Non, les collectionneurs ne comptent pas pour des prunes.
Oui, ils cherchent de plus en plus à s’affranchir du silence dans lequel les institutions les ont longtemps confinés. Première étape, devenir ami. Ami engagé cela va sans dire, que ce soit au Palais de Tokyo pour la désignation de l’artiste accueilli dans le Module découverte, ou au sein du Projet pour l’art contemporain au Centre Pompidou. Mais les choses se gâtent parfois, car les musées cherchent plutôt des partenaires dormants. « La réalité, c’est que les institutions veulent souvent notre argent, mais qu’on n’ait d’avis sur rien. Les amis ne veulent pourtant pas le pouvoir de la culture, mais vivre une culture citoyenne, fulmine Jean-Michel Raingeard, président de la Fédération française des sociétés d’amis de musées. En France, on vit sur l’illusion que l’excellence est forcément professionnelle. La pratique amateur, que ce soit dans la production de spectacles ou comme militant de l’art contemporain, n’est pas considérée. On pense qu’un collectionneur, qui fait le tour du monde pour voir les biennales et les foires, est bien moins compétent que quelqu’un de la délégation aux Arts plastiques. »
Initiatives personnelles
Sans se détourner des institutions, et parfois en collaboration avec celles-ci, les collectionneurs lancent de plus en plus leurs initiatives propres. Antoine de Galbert avec la Maison rouge (lire p. 13), Jean-Marc Salomon avec sa Fondation à Alex (Haute-Savoie) ou encore les Guerlain et leur Prix du dessin contemporain ont pavé la voie à ces nouvelles démarches personnelles. Sandra et Amaury Mulliez ont ainsi lancé le Prix SAM de 20 000 euros remis à un artiste vivant en France. Désigné le 16 décembre, le lauréat pourra mener à bien un projet dans un pays émergent et l’exposer par la suite en France. Dans le même temps, le couple offre l’opportunité, deux fois par an, à un artiste des pays émergents de bénéficier d’une résidence à la Villa Raffet à Paris. « Collectionner, c’est bien, mais c’est semi-passif. Ce que j’aime, c’est l’artiste, martèle Sandra Mulliez. Je voulais quelque chose de plus engagé et militant. » De leur côté, la collectionneuse Denise Vilgrain et la curatrice Natacha Vullierme ont lancé voilà deux ans la plateforme Collector’s Preview. L’idée ? Créer des modules d’expositions courtes dans un ancien temple protestant, avenue Ledru-Rollin à Paris, pour inviter des galeries étrangères, comme Dvir (Tel Aviv) l’an dernier et Esther Schipper (Berlin) cette année. Autre objectif, offrir aux institutions l’opportunité de montrer les coups de cœur qu’elles peuvent difficilement insérer dans leurs programmations. Ou encore permettre à un collectionneur, en l’occurrence Jean-Michel Attal, d’orchestrer une rencontre inédite entre deux artistes de sa collection, Georges Tony Stoll et Yann Géraud. Les créateurs ne sont d’ailleurs pas oubliés. Collector’s Preview invite ainsi du 25 novembre au 12 décembre deux artistes belges, Aline Bouvy et John Gillis. Le but est à chaque fois de redonner une place centrale à la parole critique lors des vernissages. Histoire de rappeler que la mondanité n’est pas forcément le moteur premier des collectionneurs.
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Les collectionneurs se mobilisent
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°313 du 13 novembre 2009, avec le titre suivant : Les collectionneurs se mobilisent