La naissance du safari-photo

La galerie Hypnos expose les photographies africaines de Radclyffe Dugmore

Le Journal des Arts

Le 4 avril 2003 - 560 mots

Les cimaises de la galerie Hypnos, à Paris, sont actuellement consacrées aux photographies de Radclyffe Dugmore, un pionnier du safari-photo. Chasseur et photographe, cet Américain est l’un des premiers à avoir, à ses risques et périls, immortalisé les animaux d’Afrique dans leurs milieux naturels.

PARIS - Le nom de Radclyffe Dugmore est plus connu des amateurs de chasse que des passionnés de photographie ancienne : chasseur émérite, Dugmore a publié plusieurs ouvrages sur la cynégétique et la vie des animaux sauvages dans leurs milieux naturels, plus célèbres semble-t-il que ses livres traitant de la photographie de nature. C’est presque par hasard qu’Arnaud Delas, le directeur de la galerie Hypnos, à Paris, a découvert les clichés animaliers de l’Américain. “J’avais acheté un ensemble de photographies lors d’une vente publique en Grande-Bretagne”, raconte le marchand, qui a été séduit à la fois par la qualité des images et par leurs contenus atypiques. “L’une d’elle portait le copyright de Dugmore, que je ne connaissais pas et, en relisant un ouvrage de Peter Beard, j’ai trouvé une photographie de rhinocéros également signée Dugmore. C’est ainsi que nous avons commencé des recherches qui nous ont permis de mettre en place cette exposition.” Avec son assistante Amélie Roche, Arnaud Delas a donc réuni plusieurs documents témoignant des premières expéditions africaines des aventuriers-photographes du début du XXe siècle, desquels il a donné un avant-goût lors de la dernière édition de Paris Photo, avec une photographie d’hippopotame de Dugmore.
La grande originalité des travaux du photographe est de s’être attaché à fixer les animaux d’Afrique de l’Est dans leur espace de vie. La photographie animalière, presque aussi vieille que le médium en lui-même, s’était jusqu’alors principalement intéressée aux animaux de zoo, produisant des images figées aux antipodes de celles de Dugmore. C’est durant un séjour long d’une année au Kenya, entre 1909 et 1910, qu’ont été réalisées ces prises de vues. Il ne fallut pas moins de quatre expéditions, qui nécessitèrent la présence d’une équipe de vingt personnes, pour que l’artiste puisse accomplir son aventureux projet. À la fois ambitieux et périlleux, le dessein de Dugmore devait s’accommoder des aléas de la vie sauvage, du danger potentiel que représentaient les animaux ainsi que d’un encombrant et fragile matériel photographique. Sans doute parmi les premiers à avoir utilisé un téléobjectif, Dugmore a encore innové en mettant au point un système d’éclairage au magnésium destiné aux prises de vues nocturnes. Ce procédé délicat et sensible, installé près d’une mare, était censé être déclenché par l’arrivée d’un animal venu s’abreuver, mais était d’un usage unique, chaque échec repoussant à la nuit suivante une nouvelle tentative.
Seize tirages virés sépia sont réunis dans l’exposition et proposés dans une fourchette de prix variant de 500 à 1 000 euros. Une douzaine de photographies africaines ont pour sujets des lions, des gazelles, des hyènes, des gnous, des zèbres, des antilopes et des hippopotames tandis que quatre autres épreuves prennent pour modèles les caribous de Newfoundland au Canada.
Au retour de son aventure africaine, Radclyffe Dugmore a rapporté dans un imposant ouvrage, Les Fauves d’Afrique photographiés chez eux, les nombreuses péripéties qui n’ont pas manqué de survenir tout au long de sa courageuse entreprise.

UN PIONNIER DU SAFARI-PHOTO, PHOTOGRAPHIES DE RADCLYFFE DUGMORE (1909-1910)

Jusqu’au 3 mai, galerie Hypnos, 52 rue de l’Université, 75007 Paris, tél. 01 45 44 99 71, du lundi au samedi 15h-19h, www.hypnos-photo.com

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°168 du 4 avril 2003, avec le titre suivant : La naissance du safari-photo

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