La foire Art Berlin Contemporary au positionnement ambigu favorise les grandes installations. Certaines sont composées d’éléments qui peuvent être vendus séparément permettant de séduire de jeunes collectionneurs.
BERLIN - Pour sa troisième édition (16 au 21 septembre), la Berlin Art Week n’a toujours pas trouvé de raison d’existence propre. Comme le rappelle Tim Renner, le nouveau secrétaire d’état à la Culture du Land de Berlin, le partenariat entre diverses institutions publiques et privées vise toujours à compenser la disparition d’Art Forum et attirer les collectionneurs étrangers à Berlin en septembre, à l’occasion des foires d’art contemporain.
La principale foire de Berlin, ABC, qui se revendique toujours comme une exposition-vente, a accueilli cette année 28 000 visiteurs, un chiffre stable par rapport à l’an passé. Avec un nombre resserré de galeries participantes (111) exposant 115 positions artistiques uniques, la présentation était plus aérée. Comme les années précédentes, elle faisait la part belle aux installations monumentales, telles que le gigantesque chandelier constitué à partir d’éléments d’éclairage public de Prague de l’artiste tchèque Kristof Kintera par la galerie Schleicher/Lange, ou bien encore la superbe installation de rideaux en aluminium de Daniel Steegmann Mangrané chez Esther Schipper. La première exposition personnelle en France de cet artiste espagnol aura lieu au Centre régional d’art contemporain Alsace en octobre. Seul galeriste français présent à ABC, Jocelyn Wolff proposait une installation d’objets trouvés, assortie de performances, de l’artiste argentin Diego Bianchi, installation qu’il aurait été compliqué, voire impossible, de présenter dans une foire classique. « ABC n’est pas une plateforme commerciale », déclare-t-il. Le concept se rapproche plus d’Art Unlimited à Bâle. C’est l’occasion pour Jocelyn Wolff de développer une relation de travail avec l’artiste qu’il exposera l’année prochaine à la galerie à Paris.
Des œuvres abordables
Tout le charme de la foire ABC réside dans la juxtaposition de ces œuvres expérimentales et/ou monumentales. Certaines galeries en profitent ainsi pour dévoiler des œuvres ou projets moins commerciaux. D’autres galeries adoptent cependant une stratégie différente, en visant explicitement le nouveau public des jeunes collectionneurs berlinois, qui déboursent rarement plus de 10 000 euros pour une œuvre. Un certain nombre de galeries proposait ainsi des œuvres comprises entre 1 500 et 8 000 euros. Deux d’entre elles sont parvenues à combiner œuvres monumentales et art abordable financièrement. Tout d’abord, la galerie Daniel Faria de Toronto, qui participait pour la deuxième fois à ABC, présentait l’installation Utopie/dystopie de l’artiste et écrivain canadien Douglas Coupland, auteur du livre Génération X. Un ensemble de globes terrestres partiellement recouverts de peinture multicolore évoquait une vision optimiste de l’univers, tandis que la vision pessimiste, représentée par des taches noires, évoquait les méandres du Canada à la recherche de pétrole dans l’arctique. La double installation prenait sens en tant que telle, mais chaque globe pouvait être acquis séparément. Bien que la version pessimiste de l’humanité fût plus puissante, les globes optimistes se sont le mieux écoulés.
La galerie Neugerriemschneider proposait, quant à elle, un concept original de l’artiste allemand Tobias Rehberger, auteur d’une fresque murale de 4 mètres par 8,25 mètres. Des gouaches et objets peints recouvrent précisément certains motifs de la fresque. Chaque tableau ou objet pouvait être acquis pour des sommes allant de 2 000 à 7 500 euros. En sus de l’objet, l’artiste remet au collectionneur une clé USB comprenant la fresque murale. Ce dernier peut ainsi reproduire la fresque, l’imprimer ou la peindre, et accrocher l’œuvre d’art originale à l’emplacement prévu sur la fresque. La stratégie de ces deux galeries s’est révélée payante puisqu’elles rapportaient des ventes satisfaisantes à la fin de la foire.
Une nouvelle foire fait son apparition dans la capitale allemande, Positions. Elle remplace la foire Preview, qui se consacrait à l’art émergent, et a été annulée faute de succès commercial. Mais selon Kristian Jarmuschek, créateur des deux foires, l’évolution est également symptomatique de la ville de Berlin : les galeries et artistes émergents qui participaient à Preview il y a dix ans sont à présent établis. Il est encore trop tôt pour déterminer si Positions, montée à la hâte en deux mois et demi, et accueillant cette année une cinquantaine de galeries aussi bien émergentes qu’établies, saura développer un concept viable. Toujours est-il qu’elle permettait de faire de belles découvertes, telles que les paysages urbains du peintre allemand Moritz Hasse.
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La foire ABC se cherche encore
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°420 du 3 octobre 2014, avec le titre suivant : La foire ABC se cherche encore