Galerie

Claude Viallat

Par Anne-Charlotte Michaut · L'ŒIL

Le 8 avril 2021 - 769 mots

PARIS

Radical et constant, l’artiste présente chez Templon une nouvelle série d’œuvres et publie aux éditions Ceysson un aspect peu connu de son œuvre : ses « taureaux ».

L’exposition « Sutures et varia », qui s’achève chez Templon, témoigne, avec la présentation de trois nouvelles séries, de l’inventivité continue de Claude Viallat, comme de la permanence de son programme artistique. À 84 ans, l’artiste ne cesse de surprendre et d’innover, tout en prolongeant les recherches théoriques impulsées au sein de Supports/Surfaces, dont il « a été et reste le protagoniste le plus déterminé et le plus influent » (Bernard Ceysson).

Ce groupe avant-gardiste, né à la fin des années 1960, voulait renoncer au tableau traditionnel, à la toile et au châssis, pour renouveler les formes artistiques. Le programme était politique : il s’agissait de déconstruire l’œuvre d’art, d’en révéler ses composants élémentaires et d’évacuer toute narrativité. Affirmant en 1970 que son travail « n’a en soi d’autre importance que d’être un jalon de la pensée », Claude Viallat déploie un œuvre programmatique et théorique, dont la richesse réside dans la grande diversité de moyens. Il se défait des matériaux traditionnels et s’empare de supports divers (bâches, bois, tissus…) qu’il recouvre en all-over d’une même forme, proche d’un osselet, répétée de manière systématique.

La force de son travail est de faire « la jonction entre l’avant-garde conceptuelle autour de l’objet et une tradition plus matissienne de la couleur et de la forme », explique Anne-Claudie Coric, directrice de la Galerie Daniel Templon. Ayant bénéficié d’une exposition personnelle au Centre Pompidou dès 1982, avant de représenter la France à la Biennale de Venise en 1988, Claude Viallat s’est imposé comme une figure incontournable de la scène française depuis des décennies. Cette reconnaissance institutionnelle est doublée d’un engouement du marché pour son travail, qui « fait l’unanimité » et « fédère différentes générations ».

Claude Viallat, fermement opposé à la réification de l’œuvre d’art, s’intéresse peu au marché, et établit le prix de ses œuvres en fonction d’un barème précis, basé principalement sur le format. Si les œuvres historiques des années 1970, plus recherchées, peuvent atteindre quelques centaines de milliers d’euros, les pièces récentes, tout aussi intéressantes, sont beaucoup plus abordables. Pour cet artiste généreux, qui a été un grand professeur, seule compte la circulation des œuvres.

25 000 €

1_Galerie Templon On retrouve avec cette œuvre datant de 2020 la répétition de la forme, alliée à un évident talent de coloriste. Par son geste, l’artiste élève cette bâche militaire au rang d’œuvre d’art, tout en célébrant son aspect prosaïque, et poursuit ainsi ses interrogations sur la définition même de la peinture. De quoi « oser croire », avec Bernard Ceysson, que « les œuvres de Claude Viallat s’imposeront, avec le temps, dans l’histoire de l’art et l’histoire comme les superbes accomplissements modernistes de la grande peinture classique, comme les derniers surgeons de l’art formaliste italien et français. »


Non commercialisé

2_Collection de l’artiste Les œuvres taurines constituent, selon Loïc Bénétière, un « pas de côté dans le travail de Claude Viallat ». Depuis la fin des années 1950, l’artiste s’adonne sans discontinuer à dessiner et peindre des taureaux sur divers supports. Cette pratique intime, décorrélée du travail abstrait pour lequel il est reconnu, témoigne de ses talents de dessinateur, ainsi que de son attachement à ses racines nîmoises. Si Claude Viallat souhaite que ces œuvres restent en dehors du marché, certaines ont été offertes à des amis proches de l’artiste, et d’autres sont aujourd’hui visibles au Musée des cultures taurines de Nîmes.


32 000 €

3_Galerie Templon Pendant les confinements, Claude Viallat a commencé une nouvelle série autour de la notion de jonction : les Sutures. Cette œuvre en est un magnifique exemple : outre la fragilité assumée de la « jonction », ce montage de tissus divers donne à voir l’attention qu’il porte à la couleur, ainsi que la dimension expérimentale de son travail. Cette nouvelle série confirme encore une fois la capacité qu’a Claude Viallat de renouveler les formes et les moyens tout en restant fidèle à ses principes radicaux.


400 000 €

4_Ceysson & Bénétière Apparue dans son travail en 1966, cette forme proche de l’osselet est devenue la marque de fabrique de Claude Viallat. Apposée au tampon ou au pochoir, elle recouvre, selon un principe de répétition systématique, l’intégralité du support, ici du tissu. Datant de 1972, cette œuvre est emblématique du travail de l’artiste, et témoigne des recherches formelles et théoriques développées avec Supports/Surfaces. Le prix élevé s’explique par cette dimension historique, alliée à la monumentalité de l’œuvre (2,60 x 5,20 m). Très recherchées, les toiles de ces années-là affichent un prix en hausse, notamment sur les marchés publics où quelques records de vente ont été récemment atteints.

Claude Viallat,
Taureaux,
Ceysson éditions d’art, 381 p., 120 €.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°743 du 1 avril 2021, avec le titre suivant : Claude Viallat

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