Une éloquente histoire de la mode

Le palais Galliera réalise un tour de force éblouissant : mettre en scène l’évolution de la mode, montrer comment un habit est modelé, une silhouette sculptée, un tissu porté, une pièce exposée, tout en retraçant en creux l’élaboration passionnante de ses collections, auparavant conservée au Musée Carnavalet. Deuxième volet consacré à la mise en lumière des pièces emblématiques de ses collections, cet accrochage chronologique se déploie du XVIIIe siècle à nos jours dans les galeries du sous-sol, récemment aménagées. La scénographie soigneusement réfléchie donne corps à la sobriété masculine du XVIIIe siècle, recrée les volumes des robes à la française, souligne la finesse des tissus (satin, soie, dentelle, mousseline), ou encore sublime les fleurs de lys décorant la robe de la comtesse de Greffulhe. Si le vêtement s’offre à voir comme une perle précieuse, il est avant tout le reflet d’une histoire socioculturelle, à l’instar de l’évolution des contraintes du corset féminin qui annonce la souplesse des robes Lanvin ou des révolutionnaires tailleurs Chanel. Ça et là, d’innombrables fantaisies et détails curieux attirent notre regard, des saynètes parant les gilets, accessoires de mode masculins indispensables, des motifs recouvrant les éventails, en passant par les robes « importables » de Paco Rabanne, faites de métal et de plastique, jusqu’au tiroir de boutons réalisés par François Hugo, aussi étonnants les uns que les autres. Complétant cette promenade au fil du temps et des modes, une galerie thématique renforce les liens entre art et mode, en dévoilant des dessins préparatoires, des photographies de magazines et des cartons d’invitation, souvent créés par les couturiers eux-mêmes, comme ceux dessinés par Sonia Rykiel. Cet ambitieux projet invite le spectateur à parcourir le musée et à en découvrir toute la richesse. Nul besoin de prétexter une exposition blockbuster pour montrer des chefs-d’œuvre.