Difficile d’imaginer que le peintre français, né en 1918 et décédé en 1988, n’avait pas bénéficié de rétrospective digne de ce nom depuis deux décennies. C’est désormais chose faite à Quimper avec l’exposition de soixante-dix-huit de ses œuvres, manifestation qui voyagera par la suite à Évreux puis Bourg-en-Bresse. L’événement s’accompagne d’une édition conséquente, la première aussi depuis de longues années.
Pour ce musée qui aime exposer sans chauvinisme des artistes bretons de premier ordre, de Jean Bazaine à Pierre Tal-Coat, consacrer sa programmation estivale à Degottex fut une évidence. Sa présence dans le Nord-Finistère à partir de 1954 en est la première des raisons. Ce lien sera décisif et lui permettra de poser les jalons d’une première période artistique dédiée au signe, synthèse de son approche de la nature et du paysage. Un très bel ensemble de dessins appartenant au Frac Bretagne, Vague, témoigne de cette direction épurée et quasiment zen. On y voit se dérouler ce travail rigoureux sur le motif (jusqu’à laisser ses feuilles tachées par les aléas météorologiques), cette patience presque abstraite atteinte pour mieux transcrire un mouvement, une trace parfois fugace sur le sable.
Des œuvres qu’il peignit avant, on sait peu de choses, surtout qu’il les a détruites en 1953 alors même qu’il obtint un prestigieux prix de peinture deux ans auparavant. L’exposition brosse sa période féconde en séries telles que les Métasignes (1961) autour de l’écriture et de la calligraphie puis celle, impressionnante et dramatique, des Suites obscures (1964).
Le décès de sa fille bouleverse non seulement son existence mais aussi son art. Il ne touchera plus un pinceau préférant s’emparer du matériau-support pour le solliciter jusqu’à l’agression. Repport-pli-bleu témoigne de cette approche physique de la matière. Il l’appelait son art minimum. Epurée de toute subjectivité romantique et héroïque, sa peinture dénudée et mise à vif ne s’est jamais départie de sa nature si zen.
Degottex entretenait d’ailleurs des liens avec le compositeur John Cage, féru d’Extrême-Orient. Plus surprenante, son amitié avec Pierre Henry amène ce dernier à produire un concert à Quimper en hommage à son ami, le 24 septembre prochain. Pour celui qui a souffert toute sa vie d’une reconnaissance fluctuante et parfois même d’un injuste oubli, l’exposition est aujourd’hui une belle revanche.
« Jean Degottex », Musée des Beaux-Arts, 40, place Saint-Corentin, Quimper (29), tél. 02.98.95.45.20, jusqu’au 29 septembre.
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Tout Degottex, sans complexe !
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°605 du 1 septembre 2008, avec le titre suivant : Tout Degottex, sans complexe !