L’acte de naissance mythique du trompe-l’œil est bien connu des latinistes : selon Pline l’Ancien, le talent du peintre Zeuxis était si grand que dans sa maîtrise de la mimesis l’artiste avait leurré la nature elle-même, puisque les fruits qu’il représentait semblaient si vrais que les oiseaux tentaient de les picorer !
Dès l’Antiquité, le trompe-l’œil stimule l’imagination des fresquistes et des mosaïstes ; délaissé au Moyen Âge, il revient en force à la Renaissance pour atteindre son apogée aux XVIIe et XVIIIe siècles où il constitue une épreuve de virtuosité pour les artistes qui rivalisent dans la maîtrise du clair-obscur. Progressivement, les jeux sur la perception se développent et empruntent d’autres chemins que le seul trompe-l’œil. Le pastiche, l’imitation et les illusions d’optique deviennent des thèmes de prédilection au XIXe siècle.
C’est cette aventure du faux dans l’art et des mécanismes de l’illusion que le visiteur est invité à découvrir au cours d’un jeu de piste stimulant proposé par le Musée des arts décoratifs. Avec une lecture transversale de ses collections, 400 pièces rarement, voire jamais exposées, pour certaines, le musée dresse un inventaire de l’illusion dans la céramique, l’orfèvrerie, le meuble, le papier peint, le bijou, mais également la mode et l’art de l’affiche.
L’exposition révèle les différents stratagèmes utilisés par les artistes pour abuser notre œil : suggérer la profondeur, tromper sur la matière, sur la fonction ou encore sur l’antiquité d’un objet. Dans ce règne du toc, la perception des matériaux se brouille : le plastique ressemble comme deux gouttes d’eau au bois massif, la céramique imite le jaspe, le porphyre ou même l’or, le papier peint revêt toutes les apparences : laque, faïence ou encore cuir. En marge du désormais classique « faux-parquet », le linoléum imite aussi le marbre, la mosaïque et parfois la peau de bête. On redécouvre également des techniques plus rares, comme les tableaux de velours qui imitent de façon troublante la peinture. Fort logiquement, l’exposition se conclut sur les jeux optiques très en vogue à la fin du XIXe siècle, comme le diorama, le zootrope et le praxinoscope, des dispositifs qui préfigurent la naissance du cinématographe, technique qui s’impose rapidement comme le théâtre des illusions par excellence.
Musée des arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, Paris-1er, www.lesartsdecoratifs.fr
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Séance de « détrompe-l’œil » aux Arts déco
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°645 du 1 avril 2012, avec le titre suivant : Séance de « détrompe-l’œil » aux Arts déco