Célébration

Saint Louis en son palais

Par Suzanne Lemardelé · Le Journal des Arts

Le 10 novembre 2014 - 622 mots

La Conciergerie consacre une belle exposition au roi de France à l’occasion du 800e anniversaire de sa naissance.

PARIS - Beaucoup l’imaginent en armure, débarquant en Terre sainte pour libérer le tombeau du Christ ; d’autres se le figurent rendant la justice sous un chêne. Né à Poissy en 1214, Saint Louis tel que nous croyons le connaître est un mythe que ses héritiers commencent à forger dès sa mort en 1270, pour mieux hâter sa canonisation, qui interviendra en 1297. Nourrie au cours de l’histoire, abondamment illustrée au XIXe siècle, sa légende a imprimé dans notre imaginaire la vision d’un roi à la fois pieux et puissant, régnant sur une France où les arts rayonnent. La très belle exposition de la Conciergerie, à Paris, consacre ses premières salles à cette construction, cherchant selon les mots du commissaire à « aller vers l’homme en passant par le mythe ». Reflet des différents regards portés sur le souverain, le beau Saint Louis de Mainneville (statue du XIVe siècle) y côtoie des toiles du XIXe, dont certaines assez inattendues, tels les décors destinés à un théâtre d’ombres où étaient joués les exploits du roi (Alphonse Osbert, v. 1900, Musée d’Orsay).

Ambitions spirituelles et politiques
Plus loin, divers objets et manuscrits précieux des XIIIe et XIVe siècles, veillés par la belle effigie d’Isabelle de France (v. 1300, collégiale de Poissy), permettent de mieux approcher l’homme. Le parcours analyse ensuite les ambitions d’un roi voulant conquérir la Terre et le Ciel. De très beaux éléments des jubés de Chartres et de Bourges, des monnaies rares, les plats de reliure des évangéliaires de la Sainte-Chapelle relatent les ambitions spirituelles et politiques du souverain. Outre leur intérêt historique, les objets témoignent de la grande émulation artistique de l’époque.

Évoquant la floraison artistique d’alors, la dernière partie du parcours revient sur le changement de mentalité qui s’opère sous le règne de Saint Louis et ses conséquences sur les arts. Un regard nouveau est porté sur la nature, notamment sous l’influence grandissante des ordres mendiants et de la redécouverte d’Aristote. En attestent les chapiteaux raffinés, où s’épanouit une végétation nouvelle, ou encore le fameux carnet de Villard de Honnecourt, couvert de croquis que l’auteur affirma réaliser « al vif ». Cette lisibilité ne touche cependant pas tous les domaines. On découvre ainsi dans la Somme autographe de Thomas d’Aquin, prêtée par le Vatican, à quel point l’écriture du philosophe était indéchiffrable. « Littera inintelligibilis », déclarent ses contemporains. Aussi belle qu’intéressante, l’exposition est assurément la manifestation à ne pas manquer parmi celles célébrant l’anniversaire du roi cet automne.

Saint Louis

Commissariat : À Paris, Pierre-Yves Le Pogam, conservateur en chef au Musée du Louvre, assisté de Christine Vivet-Peclet, responsable de la documentation au département des Sculptures ; à Angers, Guy Massin-Le Goff et Étienne Vacquet, conservateur et conservateur délégué des antiquités et objets d’art au conseil général de Maine-et-Loire
Nombre d’œuvres à Paris : 130

Saint Louis au château d’Angers

En marge de l’événement phare de la Conciergerie, diverses manifestations sont organisées par le Centre des monuments nationaux dans les édifices contemporains du règne de Saint Louis (tours et remparts d’Aigues-Mortes, château de Castelnau-Bretenoux, basilique de Saint-Denis…). Au château d’Angers, un intéressant petit parcours évoque l’art de cette époque en Anjou et questionne la postérité de la figure du roi dans la région. Quelques beaux objets médiévaux sont présentés, tel un fragment de vitrail de la cathédrale exposé pour la première fois, les morceaux d’une rose à la polychromie éclatante ou encore une jolie petite tête de femme sculptée. Dans les salles dévolues au XIXe siècle, les différentes sculptures témoignent de l’iconographie variée du saint tandis que les grands reliquaires d’orfèvrerie racontent la forte vénération dont il fut l’objet. Le tout est complété par de petits films évoquant les très nombreuses œuvres encore conservées in situ.

Saint Louis

Jusqu’au 11 janvier 2015, Conciergerie, 2, bd du Palais, 75001 Paris, tél. 01 53 40 60 80, www.conciergerie.monuments-nationaux.fr, tlj 9h30-18h, le mercredi jusqu’à 20h. Catalogue, Éditions du patrimoine, 310 p., 45 €.
À Angers, jusqu’au 25 janvier, château, 2, promenade du Bout-du-Monde, 49100 Angers, tlj 10h-17h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°423 du 14 novembre 2014, avec le titre suivant : Saint Louis en son palais

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