PARIS
La période 1780-1820 est considérée comme une période décisive dans l’évolution de l’art britannique, une période qui ouvre sur une nouvelle ère perçue comme un âge d’or.
Le portrait constituait le genre pictural le plus caractéristique, le genre du face painting comme on le dénommait alors. Depuis, le portrait d’apparat, de famille ou de groupe est associé aux noms de peintres célèbres : Reynolds, Gainsborough, Hogarth, sans compter nombre d’artistes moins connus comme Hoppner, Cotes, Romney, Ramsay, Zoffany, Weathley, Beechey ou Lawrence. Riche de la collection de la Tate Britain, l’exposition du Musée du Luxembourg s’ouvre sur la confrontation de Reynolds et de Gainsborough, qui s’imposent et s’opposent sur ce thème à partir de 1760. Tous deux sont peintres du roi, membres de la Royal Academy, et vouent la même admiration à Van Dyck. Ils se consacrent tout entier à leur art, mais leurs méthodes de travail et leurs trajectoires sont différentes. Le premier est vanté pour son invention et son ambition, le second pour sa facilité technique. La ressemblance et l’expressivité sont la préoccupation majeure de Gainsborough, tandis que Reynolds cherche par divers moyens à ennoblir et à idéaliser ses modèles à l’aide d’attributs symboliques. Parmi les œuvres de jeunesse de Gainsborough, on trouve des portraits dans un paysage conformes à la tradition de la conversation piece. C’est principalement dans ses portraits de femmes ou d’amis qu’il met au point un style original, où l’intégration des figures dans le paysage annonce le romantisme. La peinture de paysage, qui avait été reléguée au bas de l’échelle, prend à cette période une valeur nouvelle. La représentation de la campagne et de la vie rurale gagne en importance : Les Archers de Reynolds semblent tout droit sortis d’un tableau de chasse, Stubbs fait de la chasse le sujet de ses œuvres, les scènes d’écurie de Morland sont dignes de la peinture d’histoire, et Constable peint avec émotion des paysages d’arbres, d’eau et de nuages en regardant vers Ruysdaël. Mais nul autre que Turner n’a peint aussi merveilleusement les effets de la lumière et cette façon abstraite de traiter la nature. Son chromatisme vertigineux incendie ses toiles, et cette Destruction de Sodome rompt avec la linéarité des œuvres de l’exposition.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°727 du 1 octobre 2019, avec le titre suivant : Once upon a time… la peinture anglaise