Après être intervenu au Palais de Tokyo en 2012 via une expo personnelle, le jeune artiste franco-algérien Neïl Beloufa, né en 1985 à Paris, revient dans cette institution avec un projet inédit, « L’Ennemi de mon ennemi ».
Ce dispositif scénographique kaléidoscopique brasse les savoirs et les artistes, de Picasso à Polke en passant par Godard et Camille Blatrix, afin de questionner, avec le concours du commissaire Guillaume Désanges, la place du plasticien dans la sphère capitaliste et médiatique. Cédant à une certaine mode, que l’on retrouve chez de nombreux plasticiens actuels (Kader Attia, David Douard, Camille Henrot…), et qui consiste à croiser l’art avec d’autres champs de connaissance (l’ethnologie, la science, la politique, la culture, l’économie, la publicité, etc.), Beloufa propose une expo fourre-tout qui, en soi, est intéressante, car certaines pièces présentées sont fortes, comme un magnifique Courbet et une vidéo datant de 1982 de Joseph Beuys (en chanteur dans une émission de télé allemande, performance critiquant la politique d’armement de Reagan). Mais « Qui trop embrasse mal étreint » : au bout d’un moment, tout finit par se neutraliser. Par ailleurs, l’aspect bricolé de l’ensemble lorgne beaucoup trop du côté de Thomas Hirschhorn ; certes, comme pour se dédouaner, Beloufa intègre dans le parcours une pièce questionnant le statut de l’artiste de ce plasticien suisse engagé, mais l’influence trop manifeste de ce dernier, associée à un certain délitement de la forme, donne vite l’impression que la posture « tendance » prend le pas sur une démarche artistique qu’on aimerait, in fine, plus investie.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°712 du 1 mai 2018, avec le titre suivant : Le serpent se mord la queue avec neïl Beloufa