LONDRES / ROYAUME-UNI
Ils sont tous différents mais tous magiques. Les grands navires que l’exposition londonienne fait revivre ont été pendant plus d’un siècle les traits d’union entre l’Ancien et le Nouveau Monde et, pour leur pays, de luxueux ambassadeurs.
Le grand siècle des paquebots s’ouvre en 1897 avec la mise en service du Kaiser Wilhelm, le plus grand et le plus rapide de son temps, dont la silhouette va inspirer l’ensemble des futures grandes compagnies. Il se termine, symboliquement, avec la mise en service en 2004 d’un navire tout aussi prestigieux, le Queen Mary2, immense paquebot destiné à la ligne royale de l’Atlantique Nord. C’est par une maquette géante de ce paquebot que s’ouvre donc le parcours retraçant l’histoire d’un siècle qui a vu naître tant de navires remarquables au point d’être devenus, parfois, des légendes : le Mauretania (détenteur du ruban bleu de la vitesse pendant vingt-deux ans), le Titanic (né sous le signe de la tragédie), le Normandie (considéré comme l’expression aboutie du navire de rêve), le Rex (dont le film Amarcord fit l’emblème de l’Italie faciste), l’Andrea Doria (victime du dernier drame de l’Atlantique), le France (devenu le premier des bateaux de croisière géants), etc.
L’exposition développe, en premier, le progrès technique qui voit entre 1880 et 1914 l’architecture navale subir une prodigieuse mutation qui va accompagner le développement maritime du transport naval. Le second thème tient à la politique des compagnies qui ont vite compris que leurs paquebots avaient vocation à incarner autre chose que les seules exigences de sécurité, de ponctualité ou de confort, dont la Cunard avait fait son argument commercial. Au tournant du siècle, c’est le luxe qui trouve sa place sur l’océan avec l’appel aux plus grands décorateurs, luxe qui sera totalement réinventé dans l’entre-deux-guerres, pour faire du paquebot un objet de prestige.
Parmi ses pièces phares, l’exposition présente un immense panneau en laque dorée à la feuille, de Dunand, pour le Normandie, une précieuse tiare de Cartier récupérée après le naufrage du Lusitania en 1915, un panneau de boiserie du salon fumeurs du Normandie, un salon de Gio Ponti, les valises de la maison Goyard appartenant au duc de Windsor, ainsi que des pièces importantes d’artistes, de designers et d’architectes qui furent inspirés par les paquebots : Le Corbusier, Eileen Gray, Charles Demuth, Albert Gleizes… En revanche, les deuxièmes classes ne sont représentées que par une simple petite chambre, quant aux troisièmes classes, seules quelques photos rappellent l’existence d’une telle caste modeste. Ce siècle dominé jusque dans les années 1970 par les grands liners transatlantiques, au-dessus de tous les autres navires marchands tant par leur vitesse que leurs dimensions, verra dans les années 1980 l’apparition des premiers paquebots de croisière géants. De plus en plus géants.
« Paquebots transatlantiques : allure et vitesse »,
Victoria and Albert Museum, Cromwell Road, Londres (Grande-Bretagne), www.vam.ac.uk
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°710 du 1 mars 2018, avec le titre suivant : La grande histoire des transatlantiques