XIXème

Génie de la forêt

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 30 juillet 2007 - 457 mots

Le Musée d’Orsay explore l’influence du paysage bellifontain.

 PARIS - L’histoire de l’art n’a laissé à Fontainebleau que le nom d’une seule école, celle qui s’est imposée au XVIe siècle autour de la cour de François Ier. Trois siècles plus tard, c’est pourtant une véritable colonie d’artistes qui arpente l’ancien terrain de chasse des rois de France. Après les écrivains romantiques, qui découvrent le lieu dès les années 1820, c’est au tour des peintres d’associer leur nom à la forêt, tels Camille Corot, Théodore Rousseau, Narcisse Diaz de la Peña, Constant Troyon ou Jean-François Millet. Certains d’entre eux s’y installent, fuyant la ville, d’autres ne font que passer, le pic de fréquentation étant atteint vers 1875-1880. Aussi différents soient-ils, ces artistes ont en commun le goût de la nature et la volonté de rupture avec l’art académique. Barbizon, village authentique perdu dans la forêt, où l’auberge Ganne sert la soupe, devient leur base. Ainsi naîtra l’école de Barbizon, dont l’appellation apparaît dès 1880 sous la plume de David Croal Thomson, supplantant ainsi Fontainebleau, trop associé à l’image d’un art aulique, dans la mémoire de l’histoire de l’art.C’est en partie pour rétablir cette vérité qu’a été montée cette exposition fleuve. L’idée était aussi de rendre hommage au « génie » du lieu, réputé pour la diversité de ses paysages et sujet récurrent de la peinture. Avant Barbizon, les thèmes cynégétiques d’Oudry avaient déjà fait la renommée de la forêt et les peintres d’histoire, tels Achille-Etna Michallon, y trouvaient la toile de fond de leurs grandes compositions. Dans ce long catalogue de paysages émerge un sentiment de liberté. Les artistes y travaillent d’après nature, succombent à des motifs iconographiques incontournables, arbres ou clairières célèbres. L’intérêt pour cette forêt ne s’éteint toutefois pas avec l’école de Barbizon. Les pionniers de la photographie, Le Secq, Marville, Le Gray, prennent la relève. Puis c’est au tour des cinéastes et, en 1922, de Jean Renoir qui y tourne La Fille de l’eau.

Un musée forestier
Dans les années 1960, Tinguely y implante son totem monumental, Le Cyclop. De quoi alimenter, comme le souligne Serge Lemoine dans la préface du catalogue, un « processus d’artialisation du paysage », la forêt étant désormais visitée comme un musée. Tous ces artistes, pourtant, ont ignoré la référence au château. À l’exception de Picasso, qui s’installe à Fontainebleau en mai 1921. Animé par une volonté de retour aux sources de l’art classique, l’ancien cubiste s’inspire alors des lignes serpentines de Rosso et Primatice mais néglige de fait le paysage bellifontain.

LA FORÊT DE FONTAINEBLEAU, UN ATELIER GRANDEUR NATURE

Jusqu’au 13 mai, Musée d’Orsay, 62, rue de Lille, 75343 Paris cedex 07, tél. 01 40 49 48 00, www.musee-orsay.fr, tlj sf lundi, 9h30-18h, 21h45 le jeudi. Catalogue, éd. Musée d’Orsay/RMN, 208 pages, 35 euros, ISBN 978-2-7118-5288-8.

Fontainebleau

- Commissaire : Chantal Georgel, conservateur en chef au Musée d’Orsay - Scénographie : Véronique Dolfus - Nombre de salles : 11

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°258 du 27 avril 2007, avec le titre suivant : Génie de la forêt

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