Art contemporain

Fondation Miró, Barcelone

Du Pipilotti pur jus chez Miró

Jusqu’au 1er novembre 2010

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 24 août 2010 - 394 mots

On l’avait un peu perdue de vue. Pipilotti Rist, la papesse helvète (née en 1962) de la vidéo, couronnée par un Lion d’or à Venise en 2000, revient.

Torsions ludiques d’images, débauche de couleurs frénétiques, expériences sexuées et enveloppantes à coups de clips sonores et cinématographiques, Rist avait d’emblée affûté un personnage et un vocabulaire « poppy », capable de dissocier la vidéo de son dispositif habituel pour une expérience totale de l’image. Une image qui habitait volontiers les lieux d’exposition en en épousant les reliefs. 

C’est déjà ce que tentait son Regenfrau (I Am Called a Plant) (1998) projetant sur un mobilier de cuisine standard, le corps nu et surdimensionné d’une jeune femme étendue sur un sol herbeux après la pluie. Sous-texte : la domestication du féminin. Ou encore, en 2005, la projection sonore et hallucinée sur le plafond d’une église vénitienne, un paysage psychique à visionner allongé sur des matelas de velours pourpre. Un lâcher prise version collective. 

C’est aussi ce que nous raconte la Suissesse à Barcelone avec Friendly Game – Electronic Feelings imaginé dans la foulée du prix Joan Miró obtenu cette année. Au menu, pas moins d’une douzaine d’installations en forme de mini-rétrospective fidèle à son invariable principe d’immersion. À commencer par l’une de ses pièces emblématiques, Sip My Ocean (1996), vidéo à double projection installée en angle d’une image en miroir, pour une plongée aquatique dans un paysage marin voluptueux sur lequel Pipilotti pose sa voix hypnotique. En B.O. : Wicked Game de Chris Isaak. 

Suivent quelques productions plus récentes par lesquelles, une fois encore, l’image vidéo se délocalise et se dépose sur les lieux comme une seconde peau : vulves géantes projetées sur une larme de plexiglas surdimensionnée avec Gina’s Mobile, paysage jeté sur le sol avec À la belle étoile (2007), feuilles et corps voltigeant au plafond avec Tyngdkraft, var min vän (2007) à expérimenter allongé, corps relâché et écoutilles ouvertes pour une synchronie possible entre images flottantes et spectateur reconditionné. 

Bref, du Pipilotti pur jus. Entre ego sentimental, new age et Alice au pays des Merveilles. Après tout, n’avait-elle pas imaginé il y a quinze ans déjà, une maxi-chambre à maxi-fauteuil, sur lequel se hissait le spectateur nain pour mieux visionner l’un de ses films ?

Voir

« Pipilotti Rist, Friendly Game – Electronic Feelings », Fondation Miró, Barcelone (Espagne), www.fundaciomiro-bcn.org, jusqu’au 1er novembre 2010.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°627 du 1 septembre 2010, avec le titre suivant : Du Pipilotti pur jus chez Miró

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