Au Centquatre à Paris, les films et installations de Hans Op de Beeck, pas trop lisses et calibrées, laissent de marbre passé l’effet de surprise.
PARIS - Ce qui en général fascine le public dans les installations d’Hans Op de Beeck, c’est une forme de familiarité qui peut renvoyer à l’expérience vécue ou fantasmée, par le biais de la réminiscence cinématographique ou littéraire par exemple. Souvent ces décors, à habiller par nos projections personnelles, mettent en scène des portions d’intérieurs ou des paysages fictifs, déserts et figés dans une temporalité indéfinissable. Il en est ainsi au Centquatre, à Paris, dans une exposition intitulée « Saisir le silence » où, à côté de deux films, l’artiste belge a installé trois de ces « environnements » d’un gris monochrome, teintés d’un soupçon d’éclairage froid parfaitement réglé qui contribue à entretenir une sensation d’étrangeté.
Esthétisme
Caravan (2016) confronte à un paysage neigeux un chapiteau de cirque et une caravane devant laquelle grésille un faux feu. The Settlement (2013) figure un étang artificiel sur lequel sont rassemblées des maisons en bois sur pilotis et quelques barques. Quant à The Lounge (2014), il donne à voir l’intérieur d’un salon figé, occupé par une foultitude d’objets. Mais au-delà de l’effet de surprise, bien peu de choses se passent finalement, hormis cette attraction inévitable exercée par l’aspect mimétique qui renforce la curiosité – ce qui ne mène pas très loin. De même que ces films où s’enchaînent soit des aquarelles, soit des saynètes dans des paysages construits à l’aide d’objets : ils sont dépourvus de ressort et semblent n’avoir pour argument que leur seul esthétisme, ce qui est un peu court.
Si ce travail explore de façon intéressante le décalage entre le factice – manifeste dans ce qui est donné à voir – et la vraisemblance, ou supposée telle, ces œuvres souffrent d’un aspect bien trop lissé qui efface très vite le doute, empêchant toute réflexion sur la nature de ce qui est présenté.
L’ensemble pâtit en outre de ce qui paraît être l’un de ses principaux arguments : son caractère « immersif ». Le qualificatif est à la mode chez les artistes et les responsables culturels, il faut s’y faire. Plus inquiétant est le fait qu’il s’est imposé comme un gage de qualité en ce qu’il proposerait une véritable expérience de l’art. Cela laisse penser qu’une dimension spectaculaire doit désormais présider à l’œuvre en quête d’une forme de validation, ce qui est non seulement erroné mais fort triste ! Le travail d’Hans Op de Beeck n’est pas plus qu’un autre responsable de cette dérive, mais par le caractère répétitif de sa théâtralité et son manque de fond il en est un symptôme, assurément.
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Des mises en scène sans fond
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 31 décembre, Le Centquatre, 5, rue Curial, 75019 Paris, tél. 01 53 35 50 01, www.104.fr, mercredi, jeudi, samedi et dimanche 14h-19h, entrée 5 €
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°469 du 9 décembre 2016, avec le titre suivant : Des mises en scène sans fond