Quiconque a déjà tapé le carton sait que les cartes ne sont pas ménagées par les joueurs lors des parties âprement disputées.
La conservation de cartes à jouer anciennes est donc par nature une gageure. Quand ces cartes datent de plusieurs siècles, cela relève tout bonnement du miracle. L’exposition du Musée français de la carte à jouer s’apparente ainsi à un prodige. Ce dernier est en effet parvenu à rassembler quelques-unes des plus anciennes et des plus belles cartes de tarot qui sont parvenues jusqu’à nous. Mais, plus encore que leur ancienneté, c’est leur magnificence qui frappe le spectateur. Car ces tarots de luxe sont des œuvres d’art à part entière. Des chefs-d’œuvre miniatures qui condensent tout le raffinement de l’art de la Renaissance sur quelques centimètres carrés. Dessinées et peintes à la main avec des pigments précieux sur des fonds dorés à la feuille, ces cartes reprennent dès leur invention, au XVe siècle, les codes iconographiques et stylistiques de leur temps. Les cours des principaux États de la péninsule italienne raffolent de ce jeu et des cartes de prestige. Ainsi, pendant un demi-siècle, artistes et artisans rivalisent en finesse et en inventivité pour contenter les élites de Milan, Ferrare et Florence. Vers 1500, cette production de luxe s’essouffle, et les cartes essaiment à travers la Botte, puis l’Europe, dans des formats plus simples et populaires. Pour la première fois, une exposition explore cet âge d’or du tarot, jeu que l’on nomme alors « cartes de triomphe », en hommage certainement au poème éponyme de Plutarque. Cartes, manuscrits, tableaux, dessins, mais aussi objets inattendus ressuscitent ces quelques décennies fondatrices et apportent un éclairage sur leur contexte intellectuel et artistique. Le parcours, joliment scénographié, rythmé et didactique, multiplie les mises en regard efficaces. Certains rapprochements sont même de petits moments de grâce, à l’image de la réunion de famille de ces cartes sœurs qui faisaient jadis partie du même jeu de tarot.
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Chefs-d’œuvre à la carte
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°751 du 1 février 2022, avec le titre suivant : Chefs-d’œuvre à la carte