Céramique : plus vrai que nature

Matériau malléable et ductile, elle autorise presque toutes les licences et constitue le terrain idéal de l’expérimentation plastique. Cette plasticité qui permet une inventivité débridée a trouvé une résonance particulière avec les formes libres et exubérantes issues de la nature. Ainsi, paradoxalement, ce médium minéral est depuis des lustres irrigué par l’imaginaire du règne animal et végétal. Art de la métamorphose, la céramique a maille à partir avec l’iconographie de la faune et de la flore depuis plusieurs siècles. La manufacture de Sèvres, dont les productions abondent en exemples de ce compagnonnage fécond, brosse un panorama éclairant à travers 350 pièces provenant de ses richissimes fonds mais aussi de prestigieuses collections dont le Louvre, Orsay, les Arts décoratifs, sans oublier le Musée de l’École de Nancy et le château d’Écouen. Le château est en effet le temple de l’inventeur du genre : Bernard Palissy. Ses emblématiques plats ornés d’un bestiaire naturaliste moulé sur le vif à la Renaissance ouvrent magistralement le bal et sont accompagnés de pièces actuelles témoignant de la vitalité de ces objets dans notre imaginaire collectif. Les artistes contemporains, particulièrement sensibles à cette thématique, sont en effet bien représentés dans ce parcours didactique et poétique, à l’instar de Johan Creten, Jean Girel ou encore Claire Lindner. Le parcours multiplie d’ailleurs les clins d’œil entre art ancien et actuel afin de souligner la pérennité de cette source d’inspiration et son incroyable polysémie. Les œuvres les plus surprenantes ne sont d’ailleurs pas forcément les plus récentes. L’une des sensations de l’exposition est ainsi une création datant de la Restauration : un déconcertant sucrier. Baptisé Argonaute, cet objet qui emprunte la forme d’un nautile étonne autant par son apparence stylisée avant-gardiste que par sa couleur rose bonbon.