Argentine - Art contemporain - Frac

SCÉNOGRAPHIE

Argentine, une exposition des Frac en « distanciel »

Par Anne-Cécile Sanchez · Le Journal des Arts

Le 5 novembre 2021 - 625 mots

À cause de la pandémie du Covid-19, une exposition franco-argentine autour de l’art contemporain français a été construite à distance. Une première.

Buenos Aires. Sortir des œuvres des collections des différents Fonds régionaux d’art contemporain (Frac) pour les expédier à plusieurs milliers de kilomètres semblait encore une bonne idée avant la pandémie. En avril 2019, à l’invitation du Centro Cultural Néstor-Kirchner et de l’Institut français de Buenos Aires, dans le cadre de la Saison France-Argentine qui se profilait – reportée depuis sine die–, l’association Platform qui regroupe les Frac organisait le déplacement d’une délégation de plusieurs directeurs de quelques-uns de ces établissements. L’objectif était de mettre en place des collaborations croisées entre les deux pays, en amont et au-delà de l’événement, de façon durable et sur tout le territoire. « La présence des Frac pouvait favoriser la recherche de structures “alter ego” qui partageaient des problématiques contextuelles dans des villes hors de la capitale », précise l’Institut français. Pascal Neveux (ex-directeur du Frac PACA, aujourd’hui à la tête du Frac Picardie), Laurence Gateau (Frac Pays de la Loire), Emmanuelle Hamon (Frac Occitanie Toulouse), Anne Alessandri (Frac Corse) et Sylvie Zavatta (Frac Franche-Comté) étaient du voyage et ont rencontré sur place des partenaires culturels.

Outre les acquisitions de plusieurs œuvres d’artistes argentins par les Frac, parmi les projets évoqués, celui d’une grande exposition organisée dans ses murs par la Fondation Proa est rapidement devenu le plus tangible. Il est alors placé sous la houlette de deux commissaires indépendants, Sigismond de Vajay et Juan Sorrentino, chargés d’opérer une sélection dans les quelque 30 000 œuvres que possèdent les Frac afin d’en garder environ 150, dont de nombreux petits formats censés constituer un cabinet de curiosités au sein d’un parcours de plus de mille mètres carrés.

Ingéniosité et prouesses techniques

Puis survient la crise sanitaire. Le concept de l’exposition est rapidement remis en question par la fermeture des lieux et le ralentissement mondial du fret, sans compter que les Frac, inquiets, commencent également à freiner pour envoyer leurs prêts. Les deux commissaires définissent donc dans l’urgence une nouvelle approche ainsi qu’une liste d’œuvres réduite pour tenter de s’adapter à la situation. « Nous nous sommes demandé ce que nous pouvions faire dans ces conditions », résume Sigismond de Vajay. L’exposition est symboliquement rebaptisée « La suite ». Sont privilégiées les œuvres vidéo et celles susceptibles d’être recréées à distance d’après leurs protocoles.

La sélection réunit finalement une quarantaine d’œuvres : photographies, performances, installations sonores, etc., auxquelles viennent s’ajouter quelques productions spécifiques inspirées par les collections de la douzaine de Frac impliqués. Ainsi de Peter Kogler, dont le Frac Occitanie Toulouse possède un ensemble de pièces, et qui a conçu une installation spectaculaire sur le principe d’une impression numérique réalisée à distance. Figurent aussi plusieurs œuvres directement prêtées par leurs auteurs ou recréées avec leur autorisation, comme la Roue en bois et béton de Vincent Ganivet (2005-2021), les Deux Tonneaux de Roman Signer, AR.07 de Vincent Lamouroux (2008-2021), ou encore la Dolce Utopia de Maurizio Cattelan et Philippe Parreno (1996). Treize Lunes dans le ruisseau, une vaste peinture murale de Pauline Fondevila a été exécutée, avec son accord, par un artiste local.

Soutenue par l’ambassade de France en Argentine et l’Institut français, « La suite », inaugurée en juillet 2021, s’avère en définitive être moins une exposition des Frac que de certains de leurs artistes. Son maintien constitue cependant un tour de force au vu des nombreuses difficultés surmontées, de même que sa transformation est, dans une certaine mesure, exemplaire. Sa durée a été prolongée afin de bénéficier de l’attractivité de la foire arteBA prévue du 3 au 7 novembre à Buenos Aires. Son bilan tant quantitatif que qualitatif fera l’objet d’une étude qui en appréciera les retombées. Un vrai cas d’école dans la vie culturelle diplomatique.

La suite, regard sur les artistes des collections des Frac,
jusqu’au 15 novembre, Fondation Proa, avenue Pedro de Mendoza 1929 y Caminito, Buenos Aires, Argentine.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°576 du 29 octobre 2021, avec le titre suivant : Argentine, une exposition des Frac en « distanciel »

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