Son rêve, comme tous les jeunes artistes, était d’être comme Picasso. À Vallauris, durant toute une journée, Botero essaya en vain de rencontrer celui qu’il considérait comme le plus grand artiste du XXe siècle.
Les voici pour la première fois côte à côte à l’Hôtel de Caumont, le long d’un parcours qui déroule des thèmes communs aux deux artistes. L’exposition se penche sur le regard que Botero a porté sur Picasso dans un dialogue qui ne reproduit pas des formes stylistiques, mais définit par affinités ou par antinomies son propre langage.
Dès la première salle, on est frappé par l’empreinte Botero, ces volumes et rondeurs qui occupent tout l’espace des tableaux. On a l’impression que les figures sont en expansion jusqu’à pousser les cadres du tableau. Et les murs aussi. Il a découvert la monumentalité dans l’infante des Ménines de Vélasquez, cette même monumentalité rappelant les figures de la période des Femmes sur la plage de Picasso.
L’art du passé a nourri les deux artistes. Picasso copie Ribera, Vélasquez, il admire Greco et nourrit une fascination pour Ingres. Botero étudie Vélasquez, il a un goût prononcé pour les peintres de la Renaissance italienne, notamment Giotto et Piero della Francesca. Tous deux ont fréquemment réinterprété des chefs-d’œuvre de l’histoire de l’art avec audace et liberté. Ils partagent ici les références de Vélasquez et d’Ingres. La nature morte est un autre genre auquel Botero revient de façon récurrente tout au long de sa carrière. À l’époque du cubisme, Picasso fait de la nature morte un banc d’essai de ses théories. Là où le maître espagnol élimine l’unité de volume par la décomposition des formes, Botero rappelle tout objet aux valeurs de masse et de volume. Deux regards subjectifs de la réalité dans un langage propre à chacun.
Étude encore de la déformation des visages et explosion des formes pour illustrer les moments violents et dramatiques de l’histoire que Picasso dénonce avec force et que Botero sublime par des formes rondes et typiques de son style pour, dit-il, rendre acceptable le tragique. À son tour sublimation de la violence, la tauromachie est un motif identitaire très fort pour ces deux artistes de culture hispanique. La corrida de Picasso recèle des pulsions de mort. Le torero de Botero devient un être souriant qui berce le taureau sur son dos. Tout comme la corrida, le cirque attire la sensibilité des deux artistes, il nous vaut pour clore cette exposition d’admirer deux superbes toiles homothétiques, L’Acrobate de Picasso et Pierrot de Botero, à travers lesquelles s’exprime le même charme mélancolique.
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Quand Botero rencontre Picasso
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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°708 du 1 janvier 2018, avec le titre suivant : Quand Botero rencontre Picasso