Passionné de surf, de snowboard et de motocross, Lionel Scoccimaro (né en 1973 à Marseille) pratique le « custom » dans ses activités artistiques comme sportives. Un style pictural mais aussi un mode de vie qu’il nous laisse découvrir à travers ses œuvres. À l’occasion de son exposition personnelle à la Galerie Alain Le Gaillard, à Paris, l’artiste répond à nos questions.
La pièce principale de votre exposition, « Custom Made », est une voiture ; qu’est-ce exactement que la Mini Surf Car ?
C’est une Austin mini de 1971 dont j’ai customisé la carrosserie avec des « flammings », ces stickers de marques ou d’associations emblématiques de la « surf culture », et des planches de surf sur le toit. C’est aussi une sorte de juke-box puisqu’on y trouve une sélection de disques phares de la surf music (allant du reggae au punk rock). Le spectateur est invité à écouter ces morceaux et à s’imprégner de cette culture du voyage et de la « beach culture ».
Cette auto reflète la quête perpétuelle de l’ailleurs sur laquelle la culture surf est fondée. C’est aussi le jouet fétichisé de l’adulte se servant de son véhicule comme d’un signe de ralliement. Il y a également une série de huit photographies : des paysages qui cristallisent cette quête d’absolu et de plénitude que représente pour tout surfer le « bout du monde ». Enfin, une série de peintures à l’aérographe reprennent les motifs peints sur la voiture ou sur certaines planches de surf comme autant de recherches simples de formes et de couleurs : des peintures strictement décoratives revisitant les codes esthétiques de cette culture dont je suis issu.
Justement, qu’est-ce que la « beach culture » pour vous ?
C’est un mode de vie lié au plaisir de côtoyer la mer. C’est le respect de la nature et un rapport privilégié avec certains éléments. Une vraie philosophie encadre ces sports. Rappelons que le surf découle directement du mouvement hippie.
Qu’est-ce qui vous intéresse dans le custom ?
C’est la notion d’« art populaire » ou d’« art brut » qui s’en dégage. Chacune de ces réalisations me fascine par le degré de perfection qu’elle met en œuvre et la futilité dont elle témoigne. C’est pour moi un espace de liberté totale. On oscille en permanence entre grotesque et grandiose. Le spectateur lambda ne s’imagine pas pouvoir assumer un véhicule aussi haut en couleurs alors qu’il est glorifiant pour le passionné de s’afficher au volant de cet objet qui lui a demandé tant d’efforts. C’est la tentation de se mettre hors normes et de continuer à posséder des jouets, même à l’âge adulte, qui m’intéresse dans cette culture…
C’est la première fois que vous mettez le custom au premier plan dans votre travail ?
Le Surf Car est une sorte de suite à la série « Custom Made » que j’ai présentée à la dernière FIAC en 2003. Là, le custom apparaissait comme décor de mes sculptures : des culbutos surdimensionnés. Ces pièces sont aussi pour moi un moyen de déplacer ce style de peinture, de la « low culture » d’où elle vient jusqu’au plus « culturellement correct ». Cela vient de mon engouement pour le surf, le motocross ou le snowboard… et les ponts que j’ai pu établir entre ces univers grâce au custom.
Quel est votre rapport à la culture adolescente ?
Elle fait complètement partie de tout cet univers à partir duquel je travaille et dans lequel je vis. Mon travail est principalement défini par les notions d’immaturité, de régression ou d’actes mineurs. Je ferais aussi un rapprochement avec la pratique artistique qui prolonge la faculté de l’adulte à jouer au-delà de l’âge autorisé. Pour moi, même s’il y a une forte dimension intellectuelle dans l’acte artistique, l’artiste reste une personne qui « s’amuse » comme le font peu de gens. Et c’est comme cela que j’envisage mon travail : un moyen qui m’est donné de continuer à m’amuser.
Vous avez été l’assistant d’un mythe du pop art américain, Dennis Oppenheim : qu’est-ce que cet artiste vous inspire ?
C’est la part de liberté qu’il s’octroie qui m’a le plus touché, son côté profondément « contre-culture ». Ce n’est pas pour autant mon artiste favori, mais il reste à mes yeux un artiste sous-évalué par rapport à son réel apport dans le champ de la sculpture contemporaine. Quant à ce qu’il m’a appris, c’est certainement la nécessité de s’amuser et de prendre plaisir à faire ce métier… sinon il faut s’arrêter et faire autre chose.
Galerie Alain Le Gaillard, 19, rue Mazarine, 75006 Paris, tél. 01 43 26 25 35, du mardi au samedi 14h-19h30. Jusqu’au 30 octobre.
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Lionel Scoccimaro
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°199 du 24 septembre 2004, avec le titre suivant : Lionel Scoccimaro