Survoltée, transgressive… La compagnie des Chiens de Navarre pratique un théâtre sans demi-mesure, performatif et plastique. À aimer ou à détester.
Sur un coin de table, un essai de l’écrivain suédois Stig Dagerman, Notre besoin de consolation est impossible à rassasier, écrit deux ans avant son suicide en 1954. Rares sont les spectateurs qui le remarqueront. Et pourtant, il est le point de départ de la pièce. Sa source (noire) d’inspiration. La première note qui va en donner la couleur sombre. Sombre, car la création des Chiens de Navarre, Quand je pense qu’on va vieillir ensemble, présentée au Festival Artdanthé, n’a rien de drôle a priori. On y parle de mélancolie, de solitude. Celle de l’individu qui livre ici, par l’intermédiaire de chaque comédien, sa parole intime.
Mais comme toujours avec l’équipe dirigée par Jean-Christophe Meurisse, la gravité du propos est sabotée par un humour noir et une bouffonnerie épique. Difficile d’en savoir plus avant le jour J. Les pièces des Chiens de Navarre se construisent en live, car « l’intention tue la créativité ». Ceux qui les ont déjà vus en savent quelque chose : les Chiens de Navarre, on les adore ou on les déteste. Sans demi-mesure. La tiédeur n’est pas leur tasse de thé. Chez eux, on le boit plutôt brûlant, le thé. À s’en calciner les cordes vocales.
Sur scène, ils jouent la carte de la transgression. De l’improvisation sauvage. Du burlesque façon commedia dell’arte. Les répliques s’enchaînent, un personnage improbable débarque des coulisses, le rire fuse. On s’étonne de la force avec laquelle il secoue notre organisme, peu habitué à tant de jubilation au théâtre. Un rire jaune, caustique, déchaîné à s’en déformer le visage. « L’idiotie est la manière la plus intelligente de dire sa colère », confie Jean-Christophe Meurisse. Son théâtre (né de situations volontairement informes) engendre des sentiments contradictoires. Il est à la fois organique – un théâtre des pulsions, de la catharsis – et politique – il dit la violence de l’ordinaire. Chaque spectateur s’y mire comme dans un miroir. Simultanément hilare et effrayé devant sa propre vérité. Que ceux qui aiment le confort bourgeois du théâtre s’abstiennent. Ici, l’intranquillité règne. Sœur de la créativité et de l’intelligence.
quoi ?
Quand je pense qu’on va vieillir ensemble (2013), Les Chiens de Navarre.
où ?
Mac de Créteil,
1, place Salvador Allende, Créteil (94).
Et Théâtre de Vanves. 12, rue Sadi-Carnot, Vanves (92).
quand ?
Les 26, 27, 28 février,
1, 2 mars à Créteil.
Les 7 et 8 mars 2013, à Vanves.
comment ?
– 01 45 13 19 19
www.maccreteil.com
– 01 41 33 92 91
ou www.theatre-vanves.fr
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Les Chiens de Navarre - Humour noir et rire jaune
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°655 du 1 mars 2013, avec le titre suivant : Les Chiens de Navarre - Humour noir et rire jaune