LONDRES / ROYAUME-UNI
Six cents tonnes, 7 506 bidons empilés en forme de trapèze: l'artiste Christo a dévoilé lundi sa dernière oeuvre, un mastaba flottant sur le lac Serpentine à Hyde Park, une installation monumentale, déroutante, destinée autant à susciter le débat qu'à « stimuler les sens ».
En voyant cet assemblage de bidons métalliques, faisant très fortement penser à des barils de pétrole au coeur d'un des poumons verts de Londres, d'aucuns penseront à un message contre la pollution. D'autres verront dans cette installation surprenante, visible à plusieurs centaines de mètres à la ronde, un genre de prisme, un pixel géant, ou bien une simple forme géométrique.
L'oeuvre se veut par nature ouverte à toutes les interprétations et n'a pas vocation à véhiculer une quelconque déclaration, explique l'artiste. "Marchez autour, regardez-là, je ne peux rien dire d'autre", demande Christo, star mondiale de l'art contemporain connu pour les spectaculaires "emballages" du Reichstag de Berlin (1995) et du Pont-Neuf à Paris (1985), lors d'une conférence de presse organisée sur les rives du "Serpentine", lac artificiel prisé des touristes, cygnes et autres canards. "Il n'y pas de message", a ensuite précisé l'artiste de 83 ans, Américain d'origine bulgare, à l'AFP. "Qu'elle soit critique ou positive, toute interprétation est légitime".
Seule concession du créateur: l'oeuvre de 20 mètres de haut peut s'apparenter à une sorte "d'escalier vers le ciel". Première installation d'envergure à ciel ouvert de Christo au Royaume-Uni, ce mastaba (sépulture antique que l'on retrouve en Egypte et en Mésopotamie) est constitué de 7.506 bidons de métal de 200 litres reposant sur une plateforme flottante solidement ancrée au sol. Rouge et blanc d'un côté, bleu, mauve et rouge de l'autre, le trapèze offre un contraste saisissant avec les eaux calmes et bordées de grands arbres du lac Serpentine.
Étonnements et interrogations
Christo retrouve avec le "bidon" un matériau dont il apprécie le faible coût et le potentiel esthétique. L'artiste avait commencé à s'intéresser aux formes cylindriques en réalisant à la fin des années 50 des petites sculptures avec des canettes, peintes ou emballées.
En 1962, l'artiste, qui avait fui la Bulgarie communiste, avait barré une rue de Paris avec un mur de bidons, sa réponse au Mur de Berlin. Plus récemment, Christo, lauréat avec son épouse Jeanne-Claude, aujourd'hui décédée, du Praemium Imperiale, considéré comme le Nobel des arts, avait créé un mur de 13.000 bidons à Oberhausen, dans l'ouest de l'Allemagne.
Le "London Mastaba", dont la construction, financée par l'artiste, avait débuté le 3 avril, sera visible pendant l'été et jusqu'au 23 septembre, avant d'être recyclé. A peine installée, l'oeuvre ne manquait par de susciter des réactions étonnées, et partagées, chez les visiteurs de Hyde Park. "On dirait des ballons pour enfants", a déclaré, un brin perplexe, une touriste de 46 ans, Yasmin Koc Ozcengel, originaire d'Istanbul. "C'est très moderne alors que l'endroit est à la fois naturel et historique", a-t-elle souligné, estimant que ce mastaba aurait pu être accueilli par un site plus appropriée. Christo voulait provoquer la réflexion? "Il y est arrivé, parce que je suis là en train de réfléchir à ce que ça peut bien être", a dit de son côté Sheila Steffenson, une Américaine de 58 ans basée à Londres. "Peut-être s'agit-il d'un message sur la pollution? a-t-elle ajouté. Qui sait?".
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L'artiste Christo empile 7 500 bidons en plein coeur de Londres
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