BLOIS
Jadis sur ce pavé battaient en pieuses processions les moines des Minimes. De leur couvent monté en 1619 sur le site de la Closerie de Chambourdin,peut-être ces « Bons Hommes » ont-ils vu Marie de Médicis fuir du château de Blois dans les bras de Minerve comme l’a montrée Rubens.
C’est un fait singulier que le peintre flamand dut en 1625, alors qu’il achevait son cycle sur l’épouse d’Henri IV, remplacer La Retraite de la reine – un exil imposé en 1617 par son fils Louis XIII – par La Félicité de la Régence. Ce tableau d’exception, exécuté en hâte pour ne pas ajouter aux tourments de la France, présente les Beaux-Arts en chérubins choyés par leur Marie de mère. Au lieu donc de rester dans le cycle rubéniste comme la cité-prison d’un œdipe royal, Blois devint par soustraction fantôme le théâtre des arts florissants.
C’est un juste retour si les frères du Bourg-Neuf, après avoir cédé à la Révolution, au petit séminaire d’un dénommé Pointeau, à l’école primaire supérieure de jeunes filles puis au lycée Dessaignes, ont livré malgré eux le 6 de la rue Franciade à la mairie de Blois. Pour la félicité de la République, on mit à cette adresse en 1974 un conservatoire et, justement, une école des beaux-arts. Doublée d’une Fondation du Doute illuminée du saint esprit Fluxus, plus une cloche ne vient sonner dans cette cour la fin de la récréation ; le « surgé » veille à ce que l’on s’amuse. On y passe pour apprendre à composer de la musique et des images sous un mur de maximes, inscrites avec malice au frontispice de cette académie : de chiasmes en syllogismes, Benjamin Vautier, l’artiste hôte, et les siens, Maciunas, Patterson, Brecht, Ono, Filliou et Di Maggio contraignent le campus à leur plus docte doute. Il est dans l’université aussi joyeux et chaotique qu’il est sinistre et méthodique dans la philosophie de René Descartes.
À Blois d’ailleurs s’énonce avec et contre lui la Première Méditation pataphysique. On y danse, on y chante, on y peint sous la seule enseigne « Cogito ergo sum ». Ce cartésianisme en carte postale se décline en papier peint dans la cour des miracles sur trois cents tableaux-écritures, dans le Grand escalier d’Arnaud Labelle-Rejoux qui mène aux collections Fluxus, dans le pavillon d’expositions temporaires et au café bien sûr. Dans ce foyer où l’on attend de voir surgir de l’art les besogneux, les gueux, les réprouvés, naissent comme au Laboratoire 32 tenu par Ben à Nice en 1958 « idées scorbut et formes nouvelles ».
où ?
Fondation du Doute, rue de la Paix, Blois (41).
comment ?
www.fondationdudoute.fr et contact@fondationdudoute.fr
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La Fondation du Doute
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°659 du 1 juillet 2013, avec le titre suivant : La Fondation du Doute